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Les rêveries de Ludwig Hohl

Il est temps de découvrir Ludwig Hohl, un moraliste dans la tradition de Lichtenberg et de Nietzsche, et Walter Mathias Diggelmann, un romancier qui se réclame du courant réaliste.Ludwig Hohl est mort en 1980 et Walter Mathias Diggelmann en 1979 ; ces deux écrivains suisses allemands sont l'un et l'autre pratiquement inconnus en France ; leurs œuvres n'ont peut-être pas l'ampleur de celles de leurs compatriotes Max Frisch, Friedrich Dürrenmatt ou Walter Muschg. Mais il est difficile de rester insensible au récit que fait Diggelmann de la maladie qui l'emporta, et impossible de continuer à ignorer les fulgurantes improvisations poétiques et philosophiques de Ludwig Hohl.

Par FRANÇOIS BOTT.

Publié le 24 juillet 1981 à 00h00, modifié le 24 juillet 1981 à 00h00

Temps de Lecture 3 min.

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LA BRUYÈRE jugeait " l'esprit de discernement " plus rare que les diamants et que les perles. Il est vrai que le sens commun nous impose trop souvent sa pesanteur et sa parcimonie. Aussi la découverte d'un esprit comme Ludwig Hohl nous fait-elle mesurer toute la médiocrité des rencontres ordinaires

- médiocrité que chacun partage avec les autres, ses complices, même s'il se reproche de la subir, comme on subit un mauvais sort.

Ludwig Hohl était presque inconnu en France jusqu'à la publication d'Une ascension, l'automne dernier (1). Dans ce récit très sobre, on trouvait, comme dans le Vieil Homme et la mer, une parabole de notre condition. L'écrivain suisse allemand devait mourir peu après, le 3 novembre 1980, à l'âge de soixante-seize ans (2). Récemment, on a réédité un autre de ses livres au titre énigmatique : Tous les hommes presque toujours s'imaginent. C'est un recueil d'apologues et de réflexions morales. L'auteur y médite sur les sujets les plus divers, tirant des enseignements de ses rêves comme de ses expériences les plus modestes.

Pour lui, rien ne va de soi. Tout ce qu'il vit l'étonne. Il ressent à chaque moment l'étrangeté de l'existence. Ainsi, visitant le cimetière où Katherine Mansfield est enterrée, Ludwig Hohl est-il infiniment surpris d'entendre une femme lui indiquer l'endroit où se trouve la tombe de l'écrivain anglais. " Ce nom " de Katherine Mansfield, qui appartenait jusqu'alors à son " espace intérieur ", prenait subitement une mystérieuse réalité, comme ces noms de villes qui ont suscité souvent nos rêveries et qui deviennent un jour la destination d'un vrai voyage.

" J'éprouvais des sentiments étranges comparables peut-être à ceux d'un vainqueur ", écrit Ludwig Hohl. Arrivant devant la tombe de Katherine, il eut l'impression que " le temps s'arrêtait ". Il était " rempli de cette douleur joyeuse - ou de cette joie toute proche de la douleur... - qu'on pourrait qualifier de mélodie intérieure ". Chaque tombe et chaque fleur du cimetière lui inspiraient de l'amitié. " C'est ici, songeait-il, qu'on a enterré cette merveilleuse jeune fille après qu'elle fut morte, toute mince et toute menue. Car elle est vraiment morte. Nous mourrons tous, et même assez bientôt. "

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