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Patronyme "Larroumet"

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Gustave Larroumet

Généalogie de Gustave Larroumet

L'Aigle Blessé

Eloge funèbre par la Société des Études du Lot

Gaugin et Gustave Larroumet

Etude sur Gustave Larroumet par André Dormont

-- Villes et Monuments

-- Du Quercy à Paris

-- Lord Brougham

-- L'universitaire

-- Sur le théatre : Molière

---- Cécile Sorel

-- LockRoy - Les Beaux Arts

-- Le personnage et quelques anecdotes

-- Les oeuvres

-- L'Oeuvres et l'Action

-- Villecresnes

-- François Coppée

-- Emile Bertaux

-- Paul Roussel

-- Larroumet et Paul Roussel



Recherches sur Gustave Larroumet l’académicien

Gustave Larroumet Nous avons toujours été intrigués par ce Gustave Larroumet (1854-19034), secrétaire perpétuel de l'Académie des Beaux-arts, conférencier, critique d'art et professeur d'éloquence à la Faculté des lettres à Paris (il aurait donné des leçons de diction à Cécile Sorel, et aurait été aussi son premier amant !). Il a son buste exposé à Paris, à la Comédie Française, dans la galerie qui s'ouvre entre le Palais Royal et le Théâtre Français.Tomde de Gustave Larroumet à Villecresnes

Par un curieux hasard il est inhumé dans le cimetière de Villecresnes dans un monument funéraire d'importance. Il possédait en effet une maison de campagne à Villecresnes !

C’était un ami du poète, dramaturge et romancier François Coppée, qui lui même avait une maison de campagne à Mandre-les-Roses village mitoyen de Villecresnes, comme de nombreux parisiens qui, à la fin du 19éme siècle, prenaient le train pour vernir en vacances ou en week-end dans l’est parisien.

Il se trouve aussi que Monsieur André Dormont , citoyen de Villecresnes, intrigué par le monument funéraire de Gustave Larroumet Dormont a réalisée une étude sur Gustave Larroumet. Cette étude est parue dans le bulletin de la Société d'Art et d'Histoire de la vallée de l'Yerres (1999-n°26). Gustave Larroumet faisait-il partie de notre branche familiale ? Rien ne le prouve, mais il est hautement probable que cette branche Larroumet qui s’était établie dans le Quercy venait du berceau du Cantal commun a tous les Larroumet.

 

Généalogie de Gustave Larroumet


ascendance
Nom Naissance Lieu de naissance Decès Lieu de decès
Génération n°1
1 LARROUMET Jean
X
THOURAN Marie
 Philippot (Lot)  
Génération n°2
1-1LARROUMET Marc
(marchand drapier)
X
LABORIE Angélique
 Puy l'Evêque (Lot)  
Génération n°3
1-1-1LARROUMET Joséphine 1801   
1-1-2LARROUMET Joséphine 1802   
1-1-3LARROUMET Jean Achille
(marchand drapier)
1803   
1-1-4LARROUMET Antoinette 1804   
1-1-5LARROUMET Antoinette 1806   
1-1-6LARROUMET Eulalie 1808 1834 
1-1-7LARROUMET Marie Sophie 1811 1812 
1-1-8LARROUMET Etienne Jean
(employé des contributions à cheval)
X
SERRES Hyacinthe
1814Puy l'Evêque (Lot)  
Génération n°4
1-1-3-1LARROUMET Angélique Eugénie 1827   
1-1-8-1LARROUMET Auguste Louis Barthélémy
(secrétaire perpétuel de l'académie des beaux arts)
X
ANNAT Clémence
22-09-1852


1-07-1857
Gourdon (Lot)


Villeneuve sur Lot
25-08-1903


20-01-1936
Paris(inhumé à Villecresnes)


Paris(inhumé à Villecresnes)
Génération n°5
1-1-8-1-1LARROUMET Jeanne
X 1901
BERTAUX Auguste Joseph Emile
(professeur d'Histoire de l'Art)
9-09-1879

23-05-1869
Villeneuve sur Lot

Fontenay sous Bois (94)
21-05-1958

8/01/1917
Paris(inhumée à Villecresnes)

Paris(inhumé à Villecresnes)
1-1-8-1-2LARROUMET Germaine
X
ROUSSEL Hippolyte Paul René
(statutaire)
11-07-1880

25-10-1867
Villeneuve sur Lot

Paris
28-12-1939

11-01-1928
Amélie(Inhumée à Villecresnes)

Paris(inhumé à Villecresnes)
Génération n°6
1-1-8-1-1-1BERTAUX Jacques Emile
X
GUILLONET Marguerite
1902

1914
 1983

2003
(inhumé à Villecresnes)

(inhumée à Villecresnes)
1-1-8-1-1-2BERTAUX Jacques
X
LOUBIGNAC Odette
    
Génération n°7
1-1-8-1-1-1-1BERTAUX Jean Paul
(architecte)
  04-2015 
1-1-8-1-1-1-2BERTAUX Daniel     
1-1-8-1-1-1-3BERTAUX Alain     
Génération n°8
1-1-8-1-1-1-1-1BERTAUX Michèle Marguerite Jeanne
(maison Victor-Hugo)
    

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L'Aigle Blessé

Le village de Waterloo est connu dans le monde entier pour une bataille qui ne se déroula pas sur son territoire.

C’est, en effet, un peu plus au sud, sur les terres de Braine-l’Alleud, Plancenoit et Vieux-Genappe que, le 18 juin 1815, Napoléon affronta pour la dernière fois - et à son désavantage - les Anglo-Hollandais de Wellington et les Prussiens de Blücher.

"Il n'y a point de tombeau français. Pour la France, toute la plaine est sépulcre" disait Victor Hugo dans les Misérables !

Ce ne furent cependant pas les projets ni les souscriptions qui manquèrent, mais aucune suite n'y fut donnée ; ce n'est qu'en 1900, que Messieurs Houssaye, Gustave Larroumet et le comte de Mauroy achetèrent un terrain et en firent don à la société militaire La Sabretache, afin qu'elle pût y ériger un monument pour honorer les soldats français morts pour leur patrie en 1815.

Le Monument Français de l'Aigle Blessé, oeuvre du peintre, graveur et sculpteur français Jean-Léon Gérome, est situé le long de la Chaussée de Charleroi, non loin des bâtiments de la Belle Alliance, sur le territoire de Plancenoit (Entité de Lasne), à l'endroit où tombèrent si glorieusement les combattants du dernier carré de la Garde Impériale, commandés par le Général Cambronne.

D'une composition très sobre, ce monument représente un aigle blessé, en bronze, tenant dans ses serres un drapeau déchiqueté, qu'il défend encore. Sur le socle en granit si lit cette inscription : Aux derniers combattants de la grande armée

Retour Gustave Larroumet


Eloge funèbre de Gustave LARROUMET par la Société des Études du Lot

Il ne se passe pas d’année sans que La Société des Études du Lotait le triste devoir d’adresser un définitif adieu à quelques uns de ses membres. Parmi ceux dont cette année elle ne peut qu'évoquer la mémoire puisque désormais ils ne sont plus là, se trouve M. Gustave Larroumet. Tous ceux des nôtres qui partent emportent nos regrets et reçoivent le souvenir ému de notre pensée ; mais qu'il soit permis à La Société des Études d'exprimer plus profondément pour Gustave Larroumet, qui était son président d'honneur, la douleur qu'elle éprouve, et de dire avec moins de brièveté pourquoi elle a été si vivement touchée par sa mort.

Gustave Larroumet, dont la réputation avait franchi toutes nos frontières et que la vie avait fait si Parisien qu’il était de ceux qui donnent sa physionomie et son éclat à Paris, avait su néanmoins et avait voulu rester fils de ce Quercy où il était né le 22 septembre 1852 dans la pittoresque et vieille petite ville de Gourdon. C'est chez nous qu'il a passé toute son enfance et sa première jeunesse, courant par les chemins, grimpant aux arbres, chevauchant aussi, quand il n'était pas l'heure de lire et de travailler. Mais cette heure, il la faisait sonner fréquemment pour lui. Aussi les années de lycée, à Cahors et à Agen furent fécondes, au mois d’août 1870, Bordeaux le voyait, seulement âgé de 18 ans, doublement bachelier ès lettres et ès sciences.

Mais Bordeaux eut pu voir autre chose. C'était un jeune homme écolier la veille encore, qui sortait, un jour, de la faculté et se dirigeait vers une caserne, de dragons. La guerre avait été déclarée quelques semaines auparavant à la France ; nous étions battus vers l’Est ; on demandait des hommes et Gustave Larroumet, de soi même sans prévenir sa famille, avait répondu en toute simplicité : Me voilà Tour à tour dragon et franc tireur, le futur professeur fit la terrible campagne. Avait-il dan sa giberne un exemplaire des Commentaires de César ? Je ne le crois pas. Toujours est-il qu’il aurait pu y lire le portrait que le général romain traçait de l’homme de notre race dont il disait : « Le gaulois aime par-dessus tout deux choses : la guerre et l’art de la parole : rem militarem et argute loqui. » Et Gustave Larroumet aurait dans ces mots trouvé son portrait, lui dont le cercueil, plus tard, devait porter, sur un habit d’académicien la médaille militaire.

Sans transition, du camp il passa à la Faculté. Ses débuts furent lointains et modestes ; c'est en effet, comme répétiteur au Lycée d’Aix qu'il suivait les cours de l'Université. Dix ans plus tard sa belle thèse sur Marivaux le faisait docteur et lui donnait la grande notoriété. Mais à ce moment il était déjà parisien depuis plusieurs années, je ne crois pas qu'un lycée de province l'ait jamais gardé plus d'un an : Aix, Nîmes, Bourges, Vendôme, puis à Paris Stanislas, Michelet, Henri IV voilà ou il passe en ces dix années et c'est en courant ainsi sur les routes de France qu'il obtient successivement la licence, l'agrégation de grammaire, celle des lettres, le doctorat. Il n'avait plus qu'un pas à faire dans l'Université, il le fit : en 1884 il était nommé Maître de conférence de Littérature Française, à la Sorbonne ; il y restera quatre ans. Mais déjà, s'il travaillait pour ses étudiants, il jetait les yeux hors de sa salle de cours, vers les théâtres et les musés - il commençait à se faire connaître de Paris.

Ici se tourne une page de sa vie. En l888, monsieur Lockroy, ministre de l'Instruction publique et des, Beaux-Arts le prend pour chef de cabinet ; quelques mois plus tard, Castagnary, le directeur des Beaux-Arts, meurt ; ç'est lui qui le remplace. A son tour le prince Napoléon, membre de l'Académie des Beaux-Arts, laisse par sa mort, en 1891, une place libre à cette section de l'Institut ; il lui succède. Mais cette Académie d'artistes a besoin pour Secrétaire perpétuel de quelqu'un qui sache la comprendre, la représenter, la défendre au besoin et aussi la diriger. Après la démission du comte Delaborde, lui seul pouvait remplir cet office, il fût élu en 1898. Le choix était heureux puisqu'il fallait un homme qui fut un écrivain et un artiste. Entre temps il avait redemandé sa chaire de Sorbonne. Il la retrouva avec le titre de chargé de cours, qu'il devait changer en 1901 pour celui de professeur titulaire. Ce fut le grand moment sinon d'activité - elle durait depuis longtemps - du moins de vie débordante et de grand succès. Aussi faut-il se contenter simplement, d'énumérer. Cours publics à la Sorbonne et cours aux étudiants ; Conférences à l'Odéon, conférences en province, à l'étranger ; journalisme littéraire, séances à l'Institut, rapports multiples, publications d'études littéraires et artistiques, et j'abrège ; puis, dès 1899, la chronique dramatique du Temps, où il succédait à Sarcey ; voilà ce qui remplissait la vie de Gustave Larroumet.

Hélas ! C’est aussi ce qui l'a tué. Il a trop travaillé ; il s’est trop dépensé. Toujours il écrivait, toujours il parlait. C'est que son esprit était communément curieux, puissant, souple. Si l'on devait le caractériser d’un seul mot on dirait qu'il fut un homme très intelligent. Au gré d’un article de journal ou d'une étude pour une revue, d’un discours ou d'une conférence, d'un rapide essai ou d’un livre de longue haleine que de sujet il a abordés ou effleurés ! Il était également renseigné sur tout ce qui touché à la littérature et à l’art - et sur bien d'autres choses. Mais cet érudit avait la coquetterie de son érudition, il ne s'irritait pas si on la découvrait, mais il ne l'étalait pas. Aussi son œuvre est multiple A côté de ses trois grands livres Marivaux, la Comédie de Molière, Racine, des volumes d'études diverses paraissaient successivement: Étude d’Histoire et de critique dramatique (2 vol.) Études de Littérature et d'art (4 vol.) Petits portraits et Notes d'art (2 vol.) L'Art et l’État en France, Vers Athènes et Jérusalem, enfin un recueil de ses principaux discours, et j’omets quelques autres travaux. Tombe de Gustave Larroumet à Villecresnes

Cependant depuis trois ans, il n'avait rien publié. Son activité n'était pourtant pas ralentie. Au contraire, et la chronique dramatique du Temps le mettait à une terrible épreuve. Le théâtre l'avait toujours séduit ; il s'en était toujours occupé. Il ne montra jamais plus de talent que dans ses feuilletons. On les consultera longtemps et ils rendront des services. C'est que il y a écrit des pages de maître par la sûreté de l'information et la richesse documentaire, par la solidité de l’examen et la finesse du sens critique ; par la connaissance de la psychologie humaine et dramatique, par l'aisance enfin de la mise en œuvre et la clarté de l'exposition. Ses « lundis » s'étaient vite imposés à tous ceux qui s'occupent du théâtre.

Mais Gustave Larroumet qui a tant écrit n'est pas pleinement connu par ceux qui n'ont fait que le lire. Car cet écrivain fut essentiellement un orateur. Sa voix, dont on sentait qu'elle avait parlé notre idiome et qu’elle conservait le souvenir de sonorités méridionales, fut pour lui un instrument aimé et familier dont il jouait comme un virtuose. Mais sa phrase était aussi riche aussi souple que le fut cette voix. Il était clair, il était précis, il était varié. Nul ne l'a vu courir après un mot. Je l'ai entendu bien souvent, parfois il s'aventurait dans une phrase complexe, riche d'amples périodes, ornée d’incidentes imprévues, et je prenais un secret plaisir il le voir sortir de cet enchevêtrement qui n'était jamais confus à le sentir s'échapper lentement de ce savant dédale ; il donnait l'impression de la parfaite sûreté.

Le causeur en lui valait l'orateur et en différait entièrement. De l'esprit fin et prompt, de l'à propos, de la justesse, avec une verve jaillissante qui ne s'épuisait pas voilà ce que ses amis et ses hôtes connaissaient bien et ce que beaucoup d'entre nous on entendu souvent. Il racontait, du reste, avec autant d'agrément qu’il causait. Nul plus que lui n'avait la mémoire riche de souvenirs et fidèle. Il avait tant voyagé chez nous, en Europe, même vers l'Afrique et vers l'Asie Mineure. De ces voyages deux surtout l'avaient impressionné, celui qu'il fit en Grèce et celui de la Palestine. Il les a racontés en un livre qu'il a intitulé Vers Athènes et Jérusalem, « ces deux villes saintes de l'humanité » comme il dit lui-même. Et ce livre est parmi ceux qu'on relit après les avoir lus parce que non seulement ils intéressent ; mais aussi parce qu'ils émeuvent - et qu'ils font aimer ceux qui les ont écrits.

De fait Gustave Larroumet méritait d'être aimé. Il n'avait pas la bonhomie banale offerte à tout venant, mais il ne donnait jamais q'une amitié solide et fidèle : plus d'un dans notre pays l'a expérimenté. Il aimait bien ceux qu'il aimait. Son affection, qui ne se prodiguait pas au hasard était d'essence rare, on en pouvait être fier. Accueillant pour tous il avait aussi ce talent : l'art de refuser, quand il le fallait, sans froisser une susceptibilité ou blesser un amour propre. C’est que, à ses qualités de l'esprit, il joignait les dons du cœur.

Ces donc, nous en particulier, nous les connaissons, dans le Quercy. Il l'a bien aimé, ce pays si plein pour lui de chers souvenirs. Il me semble voir encore chez lui, que ce fut à l'Institut ou dans sa maison des champs à Villecresnes, ici une vue du Pont Valentré, là un coin de Gourdon, plus loin un autre tableau représentant Puy l’Évêque. Rien ne lui paraissait trop modeste quand il s'agissait du pays, aussi avait-il fait encadrer une carte postale parce qu'elle donnait une vue de Catus. Ses yeux aimaient à se reposer sur ces douces et évocatrices images. Elles lui disaient son enfance, sa famille, ses amis ; elles lui chantaient ces pénétrants rappels du passé qui, trop longtemps écoutés, donneraient la nostalgie, mais qui, entendus au passage et presque à la hâte, mettent comme un peu de fraîcheur dans une vie fiévreuse. Alors des mots patois lui venaient aux lèvres. Que de fois l'ai-je entendu évoquer les scènes ou les paysages de nos causses et de nos vallées dans la pittoresque, harmonieuse et chère langue de notre petite patrie. C'est à cela surtout que nous reconnaissons qu'il a aimé notre pays, et non point seulement parce qu'il lui a fait donner des statues ou des tableaux, parce qu'il s'est souvenu de lui « officiellement » , ce que cependant il y aurait injustice à oublier, et que aussi, l’on se rappelle.

Oui, dans ce pays, l’on se souvient de lui et nombreux sont ceux qui parlent de sa mort avec douleur ; Celle-ci fut prématurée et pourtant, depuis de long mois, il se savait perdu. Seulement lui seul le savait. Quelques semaines avant sa mort, il le dit pourtant à deux ou trois intimes amis, simplement et fermement, en leurs faisant de stoïques adieux. Car la fin de sa vie a été héroïque. Il souffrait et entrevoyait tous les jours plus imminentes, l’heure suprême, et il se taisait, accomplissant sa tâche quotidienne et semant toujours le bon grain… qu’il savait ne pas avoir le temps de germer. Il y a des courages plus bruyant, y en a-t-il de plus vrai ?

C’est pour toutes ces raisons que la Société des Etudes du lot, qu’il aimait et ou il était aimé de tous, a voulu lui dire un adieu qui ne fut pas le simple mot de séparation hâtivement jeté sur une tombe à peine fermée. L’on pouvait, du reste, longuement parler de Gustave Larroumet car sa vie a été, quoique courte, bien remplie et noblement vécue. Je crois aussi pouvoir affirmer que, parmi tant de lauriers de toute part accumulés sur sa tombe, il eut vite aperçu et chèrement recueilli, si ce lui eut été possible, cette simple branche de chêne cueillie sur des arbres de « chez lui » et déposée par « ceux de son pays ».

A. ROUX

Paru dans le Bulletin de la Société des Etudes du Lot en 1903

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Gustave Larroumet et Paul Gauguin (1848-1903)

Vente à l'hôtel Drouot, lundi 23 février 1891.

Le 7 mars une semaine à Copenhague. Retour à Paris, démarches auprés du ministre de l'instruction publique et des beaux-Arts.

"Je désire me rendre à Tahiti afin d'y poursuivre une série de tableaux sur le pays dont j'ai l'ambition de fixer le caractère et la lumière. J'ai l'honneur de vous demander Monsieur le ministre de bien vouloir, ainsi qu'il a été fait pour Monsieur Dumoulin, me confier une mission qui, gratuite, faciliterait cepandant par les avantages qu'elle entraine mes études et mon transport".

Sur les conseils de ses amis il envoya la lettre directement à Mr Larroumet, directeur général des beaux-Arts.

Mr Larroumet était tout disposé à recevoir Gauguin dans son bureau rue de Valois pour discuter des modalités.

Gauguin obtint sa mission. Mais lorsqu'il voulut revenir Mr Larroumet n'était plus ministre et n'obtint pas le paiement de son voyage de retour. Sans le moindre sous Gauguin restera à Tahiti jusqu'au 13 juin 1893.

Mr Larroumet avait promi à Gauguin de lui acheter des toiles afin de le dédomager.

Gauguin est parti le 31 mars 1891; aprés 4 jours de traversée il arrive à Papeete le 8 juin.

Sélection de toiles tahitiennes

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A la recherche de Gustave Larroumet

André DORMONT (1999)

Une Villecresnoise m'a dit un jour :« Quand j'étais petite, accompagnant mes parents au cimetière, j'étais très impressionnée par ce personnage gisant sur une tombe qui dominait les autres et je me demandais qui était ce Gustave Larroumet ».
C'était en effet une notabilité parisienne que la villégiature y avait amené et restée en marge malgré son tombeau, Villecresnes n'étant pas le « Père Lachaise ». Il n'existait pas localement de documents le concernant, sauf les lignes que lui avait consacrées le Docteur Jean Gautier dans un ouvrage scolaire sur son village et reprises dans le numéro 19 du Monmartel. Il avait écrit alors : « ...cimetière... On y voit le monument funéraire de Gustave Larroumet, professeur littéraire, secrétaire perpétuel de l'Académie des Beaux-Arts, mort en 1903. La vie de Gustave Larroumet fut brève. Professeur en Sorbonne, il fut vibrant, ingénieux et profond. Directeur des Beaux-Arts, il se montre mécène éclairé ;critique du « Temps », il fut loué pour sa conscience. Secrétaire perpétuel de l'Académie des Beaux-Arts, il siégea avec un naturel et un caractère très élevés ! » Et puisque aujourd'hui Jean Gautier dans le Monmartel consacre un développement à François Coppée qui fut contemporain de Larroumet et son voisin de villégiature à Mandres, c'est l'occasion de revoir dans la revue ces deux hommes de lettres.

Cette étude reprend un travail antérieur, mais en signalant que depuis, dans la foulée de l'action des services du Patrimoine et dans l'intérêt né pour l'art de la seconde moitié du XIXè siècle et du début du XXè amené par le Musée d'Orsay, le monument de Villecresnes a figuré en bonne place dans un ouvrage intitulé « D'ombre, de bronze et de marbre - sculptures en Val-de-Marne » ‘Images du patrimoine’ édité sous l'égide des Affaires Culturelles et des Archives départementales.

La référence au monument avait aussi figuré dans l'édition Flohic sur le patrimoine des communes de France (Val-de-Marne, 1993) et elle vient d'être prise en compte dans le numéro hors série de Villecresnes-magasine de janvier 2000. Mais l'Homme reste à découvrir.

André DORMONT

Tombe de Gustave Larroumet à Villecresnes

VILLES ET MONUMENTS (Retour)

Lorsqu'au début du siècle on demanda aux instituteurs d'établir la monographie de leur village, celui de Villecresnes, François Boëte, termina son ouvrage par un chapitre sur les personnages célèbres, et par ces lignes :
«  ... de nos jours, Monsieur Gustave Larroumet, secrétaire perpétuel de l'Académie des Beaux-Arts, professeur d'éloquence à la faculté des lettres de Paris... depuis 1891,... vient aux ‘Peupliers’ passer la belle saison et s'y reposer des fatigues du professorat »
Et lorsque quatre-vingt ans plus tard, en application d'une décision d'André Malraux (1954) concernant l'inventaire général des monuments et richesses de France, fut établi en 1983 celui de l'Île-de-France, il a été fait état pour la commune de Villecresnes, de la tombe, dans le cimetière, de Gustave Larroumet, formant un monument sépulcral répertorié.

Gustave Larroumet : ce nom, qui dans le langage du sud-ouest dérivé des parlers occitans signifierait « La Ronce »" est encore répandu dans l'Aquitaine. Il nous amène dans le Quercy.

Gustave Larroumet a en effet dans le département du Lot, son avenue à Gourdon (où il est né), un boulevard à Catus où vécurent ses parents, et une rue à Cahors (où il a été lycéen). On a pu voir aussi son buste, sculpté par Injalbert, au musée de Cahors.

Injalbert (1845-1933) avait son atelier à Paris 18, rue du Val-de-Grâce et Larroumet habitait au 9. Son portrait d'universitaire par Léon François Commerré (1850-1916), offert à la ville de Gourdon par Madame Larroumet a fait récemment l'objet d'une restauration et est exposé en Mairie.

Mais Gustave Larroumet a aussi sa rue à Paris, dans le quinzième arrondissement, depuis 1935, époque à laquelle l'ancienne usine à gaz de Paris a été remplacée par le square Saint-Lambert. Buste de Gustave Larroumet à la Comédie Française (Paul Roussel)

La rue Gustave Larroumet avoisine celles portant les noms de personnalités de la même génération, qui d'ailleurs se connaissaient et s'étaient rencontrées, tels que le peintre Léon Lhermitte et l'architecte Jean Formigé, qui fut lui aussi membre de l'Académie des Beaux-Arts et qui en 1899 avait été l'un des auteurs de la statue de l'urbaniste Alphan, dont le discours d'inauguration avait été prononcé par Gustave Larroumet.

Et surtout Gustave Larroumet a son buste à Paris, à la Comédie Française, dans la galerie extérieure qui s'ouvre entre le Palais Royal et le Théâtre Français (1904). C'est-à-dire, très symboliquement entre le lieu où il eut son bureau à la direction des Beaux-Arts et le lieu le plus prestigieux du Théâtre dont il fut un spécialiste passionné.

Gustave Larroumet n'a pas sa rue à Villecresnes. Mais il a ce monument funéraire où il figure reposant allongé en un gisant, décoré à l'arrière plan, à titre symbolique de motifs rappelant une bibliothèque, la Sorbonne et l'Institut. Cette sorte de gros œuvre formant arche entoure la pierre tombale, deux médaillons complètent de part et d'autre la décoration. Il est érigé sur le terrain d'une concession perpétuelle n° 45 de la quatrième division.

Dans cette sépulture reposent avec d'autres membres de sa famille. Gustave Larroumet et son épouse, née Clémence Anat, originaire de Villeneuve-sur-Lot, ainsi que ses deux filles Jeanne et Germaine Larroumet, toutes deux nées à Villeneuve-sur-Lot, et respectivement épouses de Emile Bertaux et de Paul Roussel aussi inhumés dans le même tombeau.

Les caractéristiques en sont ainsi rapportées dans l'indicateur du patrimoine architectural de l'inventaire général du ministère de la Culture (Etude de A. Ferraut, 1983).
« Monument sépulcral de Gustave Larroumet... rue de la Garenne... Tombe de Gustave Larroumet membre de l'Institut réalisé par Nicole (sic) entrepreneur à Mandres ; médaillons en bas relief de Paul Roussel, sculpteur à la villa Médicis - Propriété privée - calcaire technique de décor - sculpture hauteur 215 largeur 210 - représentation portraits de Paul Roussel et d'Emile Bertaux - Gisant de Gustave Larroumet ». Il est cité ici une ancienne entreprise de Mandres Nicol (Alexandre et André).

Il résulte que les gendres de Gustave Larroumet étaient :

  • Auguste Joseph Emile Bertaux (1869-1917), professeur à la Sorbonne, conservateur du musée Jacquemart-André.
  • Hippolyte Paul René dit « Paul-Roussel »(1867-1928), - statuaire grand prix de Rome - officier de la légion d'honneur, auteur du gisant de Villecresnes et du buste de la Comédie Française.

De ces deux personnages il sera question par la suite.

DU QUERCY À PARIS (Retour)

Louis Barthélemy Gustave Paul Larroumet était né à Gourdon (Lot) le 22 septembre 1852 d'un père fonctionnaire des Contributions indirectes.

Il est décédé à Paris le 25 août 1903.

Son enfance et son adolescence se sont déroulées sous le Second Empire et sa vie sous la troisième République naissante, puis confirmée en 1875. Il n'a pas connu la guerre de 1914-1918, étant mort jeune à 51 ans, mais il a connu la guerre Franco-Prussienne de 1870, époque où il n'avait pas encore vingt ans. Gambetta, son aîné de quinze ans et originaire de Cahors, s'est efforcé alors d'organiser la résistance en Province.

Larroumet a été engagé volontaire et franc-tireur à l'armée de la Loire, et finit la guerre comme sous-officier de Dragons.

C'est peut-être le souvenir de cette période qui l'amena plus tard, alors qu'il était directeur des Beaux-Arts à écrire un livre sur le peintre Henri Régnault tué en 1871 à 25 ans à Buzenval. Ce peintre avait fréquenté à Paris, place Pigalle, le cabaret « Le Rat Muet » avec Courbet, Manet et Gambetta. Dans la « Cour du Murier » de l'Ecole des Beaux-Arts de Paris s'élèvent son buste et le monument à sa mémoire.
André Chaumeix a raconté comment Gustave Larroumet leur avait parlé d'un ancien élève du lycée, Henri Régnault, faisant son portrait d'externe au lycée Henri IV et de promeneur croquant les dessins d'animaux au jardin des Plantes, ainsi que des circonstances de sa mort dans les bataillons de Marche où il s'était engagé en 1870. (Le Lycée Henri IV - Gallimard, 1936) - (et Henri Régnault par Larroumet - Quantin, Paris 1889).

Gustave Larroumet semble avoir d'abord envisagé une carrière militaire, puis des études médicales, abandonnées pour raison de santé, ce qui l'amena en convalescence à Aix, ville de faculté où il s'inscrivit. Il a fait carrière comme universitaire et c'est dans ce cadre qu'il est parvenu à la notoriété dans le domaine des lettres, de la critique théâtrale puis dans les Beaux-Arts, sans toutefois être lui-même auteur, ni créateur.

Dans un avant-propos à son livre « L'Art et l'Etat en France » (Hachette) daté de Villecresnes du 22 septembre 1895, Larroumet a écrit vouloir « se mettre en scène » en racontant ses études universitaires à Aix et à Paris et comment de professeur et maître de conférence en Sorbonne, il devint un peu par hasard chef de cabinet, puis directeur des Beaux-Arts.

Il avait été élève au Collège de Gourdon où vivait sa grand-mère maternelle qui, veuve d'un Procureur du Roi, comptait parmi les notabilités, alors qu'à Catus, ses parents avaient une vie modeste. A Gourdon il fut aussi influencé par un oncle, ancien de la guerre de Crimée et surnommé : « Sébastopol », impressions d'enfance qui expliquent peut-être le goût pour l'armée et le patriotisme que Larroumet, dont le père aussi avait été militaire, exprima toute sa vie.

Puis il fréquenta le lycée de Cahors (après son prédécesseur illustre : Gambetta) et celui d'Agen. Le lycée de Cahors prendra le nom de lycée Gambetta en 1888 alors que Larroumet était Directeur des Beaux-Arts sous le ministre Lockroy.

Après l'interruption de la guerre de 1870 qui avait marqué la santé du jeune combattant, c'est à Aix qu'il poursuivit ses études tout en étant répétiteur. On le trouve alors parmi les étudiants républicains dans les bagarres avec les « Blancs ». Sa carrière de professeur commence très peu de temps en province, puis à Paris où il est professeur agrégé à la fois de grammaire et de lettres, dans les lycées parisiens : Collège Stanislas, Vanves et Lycée Henri IV. Il devient maître de conférence à la Sorbonne en 1884.

LORD BROUGHAM (Retour)

Sa première oeuvre caractérise bien l'ambition de l'intellectuel à la notoriété. Etant professeur à Stanislas, il participe à un concours ouvert pour le centenaire de Lord Brougham (1778-1868), ancien Grand Chancelier d'Angleterre, mais qui fréquenta la France à partir de 1834 et mourut à Cannes dont il est considéré comme un pionnier du développement. Le travail de Larroumet, médaille d'or, a donné lieu à une publication à la « Librairie du collège de France, de l'Ecole Normale Supérieure et des Ecoles Française d'Athènes et de Rome. » (Thorin éditeur 1879).

L'UNIVERSITAIRE - MARIVAUX (Retour)

Etude sur Lamartine Sa thèse principale en Français soutenue le 20 décembre 1882 a porté sur Marivaux, et une thèse en latin a porté sur le quatrième livre (controversé) des élégies du poète latin Tibulle. (De quarto Tibulli Libro Hachette).

Dans un rapport sur le Doctorat es Lettres présenté en 1886 à la Société d'Enseignement Supérieur, Larroumet alors maître de conférence à la Sorbonne se prononçait pour le maintien de la thèse en latin controversée.

Sa thèse française est à l'origine de son oeuvre principale, couronnée par l'Académie Française éditée sous le titre « Marivaux sa vie et ses oeuvres, d'après de nouveaux documents ». Ce livre fait encore autorité de nos jours et on le trouve cité dans les histoires de la littérature française et dans les biographies de Marivaux (Hachette éditeurs 1882-1894-1910).

Sans nous étendre sur un commentaire critique dépassant les propos de cette étude, signalons toutefois que les opinions de Larroumet peuvent être encore prises en référence.
Par exemple :

  • A propos des parties 6 à 8 du « Paysan Parvenu » considérées comme des pastiches, dont Marivaux n'est pas l'auteur - (« Romans », édition La Pléiade par Marcel Arland - p. 1131).
  • A propos de la fille de Marivaux : La revue n° 2 de la « Société Marivaux », Lyon 1992, a cité Larroumet au sujet des incertitudes sur la date de naissance de Colombe-Prospère qui ont été levées par la découverte de l'acte de baptême aux archives départementales du Val-de-Marne, acte établi curieusement à Ivry-sur-Seine (26 janvier 1718), antérieurement à celle supposée de 1721, ce lieu discret en raison, semble-t-il, d'une naissance prématurée. Cette indication a été rapportée par la citation d'un article de Jacques Houdaille dans la revue de démographie « Population » N° 4/5 de juillet/octobre 1988.

SUR LE THÉÂTRE : MOLIÈRE (Retour) Etude sur Lamartine (suite)

Gustave Larroumet avait fait le 14 février 1885 à la Sorbonne une conférence pour l'Association Scientifique de France sur le Théâtre : « Une famille de comédiens au XVIIe siècle - les Béjart » - parue chez Gauthier-Villard en 1885.

Il a d'autre part écrit sur Molière en 1887 « La comédie de Molière » (Hachette 1887) -« l'Auteur et le Milieu » - « Poétique et Morale ».

En outre « Le Théâtre et la Morale » et « les Comédiens et les Mœurs » ont été édités dans « Etudes d'Histoire et de Critique Dramatiques » (Hachette 1892), ouvrage composé d'une suite d'articles de 1887 à 1891 parus dans la Revue des deux Mondes et la Revue Politique et Littéraire (Revue Bleue) et provenant du cours à la Faculté des Lettres de Paris de 1884 à 1888 ou des conférences à l'Odéon.

Ce n'est pas le propos ici de faire une étude d'histoire et de critique littéraire sur Molière ou sur le théâtre, tout en précisant toutefois que Larroumet se pose généralement en défenseur des comédiens. Mais il a une affection particulière pour les Béjart, « fondateurs de la Comédie Française ». Il a écrit à ce propos : « J’ai souvent formé un vœu : dans ce foyer public que décorent des chefs d'oeuvres... il manque à mon sens non pas deux statues ni deux bustes, mais deux médaillons : je voudrais voir, à côté de Molière, Madeleine et Armande Béjart. »

Il a très nettement pris la défense d'Armande Béjart, considérant que Célimène, où Molière avait mis quelque chose d'Armande, est coquette, mais impeccable. Et ses développements sur l'interprétation de l'aventure de Molière avec Armande à travers des pièces telles que « l'Ecole des femmes », « l'Ecole des maris », et « Georges Dandin » concluent que la tristesse de passages de l'Ecole des femmes ne prouvent rien contre Armande.

A propos de Molière, il fut critiqué et quelque peu ridiculisé, mais défendu par Francisque Sarcey, pour avoir trop voulu soutenir l'innocence de la femme de Molière, Armande Béjart, dont on déclare « qu'il était amoureux » (La comédie de Molière - Hachette 1887, et une famille de comédiens - Les Béjart - 1885).

Il a lui-même écrit « A propos du présent travail : je me suis vu moi-même enrôlé parmi les ‘Armandistes’ comme on les appelle, par M. Jules Lemaître (Journal des débats 1881-1882) et M. Francisque Sarcey (Temps 25 janvier) - Au lecteur de juger jusqu'à quel point je mérite de prendre place en cette galante compagnie. »

Larroumet n'a d'ailleurs pas ignoré les comédiennes dans ses oeuvres puisqu'il a écrit notamment sur Armande Béjart, et sur Adrienne Lecouvreur.

Et puisqu'il a été question de Célimène c'est l'occasion ici de raconter l'anecdote suivante sur les rapports de Larroumet et du Théâtre.

CÉCILE SOREL

André de Fouquières dans le récit de ses anecdotes parisiennes raconte à propos de l'Odéon, qu'à cette époque Cécile Sorel, qui débutait, avait pour lui donner des leçons particulières et pour l'initier aux secrets des grands classiques « un universitaire chevronné Gustave Larroumet ».

Cécile Seurre, son vrai nom, née en 1873, n'était encore qu'une jeune actrice, bien que participant déjà à l'agitation du milieu théâtral. Sur celle qui allait devenir « Célimène » pour la vie, André de Fouquières écrit notamment :

« Madame Sorel n'avait encore que peu d'occasions d'opposer sa crânerie aux brocards de la ville. Les brocards dont elle commençait à se vêtir étaient ceux du répertoire de l'Odéon, où elle débutait obscurément ; sinon modestement. Elle débutait un peu moins modestement dans le tout Paris, car elle avait déjà maison montée, au coin de l'avenue George V, juste au-dessus de l'actuel ‘Fouquet's’. ... Elle avait alors l'âge de cette Célimène dont le savant professeur en Sorbonne lui montrait toutes les complexités d'âme et à qui elle devait plus tard s'identifier, et quand elle s'était attardée sur quelque maison de couture pour ses affaires d'atours, on pouvait apercevoir sur les balcons de dame Sorel, Gustave Larroumet guettant le retour de son élève impatient de reprendre la leçon interrompue. Se choisissant un tel maître, la jeune ambitieuse se montrait fort avisée. Larroumet était en effet titulaire du feuilleton dramatique du ‘Temps’. Parlant de la jeune comédienne au lendemain d'une réception générale, le critique aurait-il pu désavouer son propre enseignement ? » (A. de Fouquières, Mon Paris et ses Parisiens, éd. P. Horay, 1953).

LOCKROY - LES BEAUX-ARTS (Retour)

Reprenons ici la chronologie : Maître de conférence de littérature française à la Sorbonne en 1884, il est ensuite Directeur des Beaux-Arts de 1888 à 1891, appelé à ce poste par Edouard Lockroy alors ministre de l'Instruction Publique et des Beaux-Arts, puis sous la tutelle de Fallières et de Léon Bourgeois.

Gustave Larroumet chez lui C'est par Edouard Lockroy que Larroumet va être orienté vers les Beaux-Arts. Edouard Simon dit Lockroy né en 1840 était le fils d'un acteur-auteur, fournisseur de Vaudevilles, collaborateur de Scribe. Il avait été dans l'opposition sous l'Empire, représentant de la Seine en 1871, député d'Aix en 1876, il était considéré comme le gendre de Victor Hugo ayant épousé Alice la veuve de Charles Hugo décédé en 1871 et mère des deux petits enfants de « L'Art d'être grand-père » Georges et Jeanne. Il était ministre de l'Instruction publique dans le Cabinet Floquet en 1888-1889. Il appela Larroumet comme chef de cabinet le connaissant de réputation par son passage à Aix. Puis le décès du Directeur des Beaux-Arts amena très rapidement Larroumet à ce poste de 1888 à 1892. C'est à cette époque qu'ils préparèrent l'exposition du centenaire (1889). Lockroy par la suite se spécialisa dans la Marine, dont il fut plusieurs fois ministre.

Chargé de cours, puis professeur à la Faculté des Lettres de Paris en 1892.

A cette époque membre de l'Institut, à l'Académie des Beaux-Arts, il devient secrétaire perpétuel de cette académie en 1898.

LE PERSONNAGE ET QUELQUES ANECDOTES (Retour)

LES COMPATRIOTES

Larroumet a été professeur, critique et administrateur, il a aussi été un guide, sinon mécène pour les étudiants et pour ses compatriotes du midi.

On peut lire dans un document sur Léon Lafage (1874-1953), originaire du Lot et qui fut écrivain régionaliste et journaliste, ce qui suit concernant ce dernier : « Après le lycée Gambetta ce fut l'école de droit à Paris. Le critique littéraire influent était alors un cadurcien Gustave Larroumet... Il avait accueilli et encouragé les premiers essais de Lafage » (Bulletin de la Société des études du Lot, 1993).

L’ODÉON

Larroumet a été cité précédemment à propos d'Henri Régnault pour les conférences qu'il faisait aux étudiants. Il a fait notamment au théâtre de l'Odéon avec Francisque Sarcey un cycle de conférences et a fait état à ce propos de son amitié avec Francisque Sarcey.

André Chaumeix en parle ainsi dans ses souvenirs rapportés dans son livre sur le lycée Henri IV : « ... Sans aller plus loin que l'Odéon, nous trouvions à satisfaire bien des curiosités... En ce temps là l'Odéon avait imaginé des matinées du jeudi précédées d'une conférence faite par un professeur et consacrées à des représentations classiques d'oeuvres rarement jouées ou d'oeuvres du répertoire. Nous avons ainsi entendu Ferdinand Brunetière... Larroumet, René Doumic et Francisque Sarcey... »

L'ORATEUR MONDAIN

Gustave Larroumet homme de lettres, avait un remarquable talent d'orateur, tant par la clarté de son expression que par sa voix de méridional aux accents du Quercy, sonore et chantante, orateur cadurcien comme l'avait été avant lui Gambetta.

Cette qualité explique le succès dont il bénéficia auprès de ses auditeurs et aussi de ses auditrices dont il arriva qu'elles transforment ses cours et conférences en réunions mondaines. L'une d'elles en particulier se produisit le 17 février 1893 en Sorbonne et est restée dans la mémoire des chroniqueurs : La salle avait été remplie d'avance par les dames mondaines venues entendre Larroumet en sorte qu'à l'heure du cours les étudiants n'avaient plus une seule place, ce qui a donné lieu à une bagarre obligeant Larroumet à quitter les lieux et suivie d'une expulsion des dames conspuées par les étudiants.

Le signataire de ces lignes peut confirmer cette anecdote, ayant entendu ce récit de la bouche d'une cousine, qui elle-même, dans son enfance en avait entendu le témoignage verbal en famille de deux auditeurs de l'époque.

MOUNET SULLY - GASTRONOMIE

Pour compléter ce chapitre d'anecdotes, il reste à rapporter une activité gastronomique dont la source est Gault et Millau (Guide gourmand, Hachette 1970).

Larroumet, critique dramatique, fréquentait parmi les acteurs le tragédien Mounet-Sully, originaire de Bergerac, qui organisait des concours culinaires sur le thème du cassoulet dont il raffolait. Dans un concours à trois avec Larroumet et Adolphe Brisson, c'est ce dernier qui l'emporta grâce au fumet d'un vieil Armagnac.

Dans un article de 1896 repris avec « Petits Portraits et notes d'Art » Larroumet a raconté ses visites chez les frères Mounet rue Gay-Lussac et les dîners entre amis et compatriotes périgourdins « tous plus ou moins félibres ou cigaliers », l'un des frères surveillant la cave et l'autre la cuisine, tous deux secrétaires de la Comédie Française, ayant épousé les deux soeurs et habitant la même maison.

FÉLIX POTIN

Personnalité et même célébrité, Larroumet l'a été certes en son temps, et voici un signe qui ne trompe pas. Il figure parmi les photographies des « 500 célébrités contemporaines » de la collection Félix Potin ! Sa place dans l'album au titre des « hommes de lettres » est sur la même ligne (ordre alphabétique oblige) que Victor Hugo ! Dans cet album, au titre des hommes politiques, figure aussi Edouard Lockroy, qui fut son ministre de tutelle aux Beaux-Arts. On trouve aussi Cherbuliez, Coppée, Goncourt, Sarcey, Puvis de Chavannes, Falguière, Garnier, etc...

Rappelons nous, puisque nous sommes avec Monmartel, qu'un brunoyen célèbre (Romi) a commenté les images « Félix Potin » dans un petit livre « Usine à gloire ».

GONCOURT - LÉAUTAUD

Mais il y a aussi ceux qui ont la dent dure :

Edmond de Goncourt dans son journal décrit Larroumet. « Ce Larroumet, ce conseiller du goût de Coppée, cet ex-directeur des Beaux-Arts, cet interdicteur de ‘La fille Elisa’, c'est un petit homme noirâtre, l'air pas bon... »

Si Larroumet fut en butte de son vivant aux sarcasmes d'Edmond de Goncourt, qui malgré ses rencontres à Mandres chez François Coppée, ne lui pardonnait pas d'avoir critiqué « La Fille Elisa » il eut aussi à subir dans sa mémoire un autre mémorialiste, lui aussi entier dans ses jugements.

Il s'agit de Paul Léautaud (1872-1946). Et on ne peut passer sous silence, à propos d’un monument consacré, à Paris, à la mémoire de Larroumet, ces remarques acerbes contenues dans le « Journal Littéraire » (Mercure de France Editeur 1954) les 16 février, 27 mars, 7 et 9 avril 1906 notamment, ceci « On va placer, sur un des murs de la Comédie Française, un médaillon de Larroumet à l'instar de ceux de Corneille, Racine et Molière qui s'y trouvent déjà. C'est dire clairement qu'on doit dire désormais : Corneille, Racine, Molière et Larroumet ».

Léautaud se trompait, on passe aujourd'hui sans le regarder pour aller voir les colonnes de Buren !

LES ŒUVRES (Retour)

Son oeuvre, outre les recherches de base sur Marivaux, est variée en raison même de l'évolution de son activité et de ses titres.

Auteur de nombreux discours à l'occasion de distributions de prix, d'inaugurations de monuments, d'obsèques de personnalités littéraires ou artistiques, de cours et conférences à l'université, au Conservatoire et à l'Institut, de notices et communications à l'Académie des Beaux-Arts, de préfaces d'ouvrages d'art, d'articles de revues de journaux, tels que la « Revue des Deux Mondes », la « Revue politique et littéraire » (Revue bleue), « Le Temps », la « Revue d'art dramatique », etc...

Cette activité est reprise dans l'Edition soit en oeuvres distinctes, soit en oeuvres regroupées :

  • Marivaux - Hachette - Editions 1882-1894-1910.
  • Classiques Garnier : « Le Cid » éditions de 1880 à 1905; « Andromaque » éditions de 1884 à 1920.
  • « Les Précieuses Ridicules » éditions de 1884 à 1887.
  • Racine - Les Grands Ecrivains - Hachette -Editions de 1898 à 1919.
  • La Comédie de Molière - Hachette -Editions de 1887-1893-1903.
  • Le XVIIIe siècle et la critique contemporaine - Leçon d'ouverture du cours de littérature française - 11 décembre 1891 – « Revue Bleue », Adrienne Lecouvreur, 1892.
  • Hachette : Etudes d'histoire et de critique dramatique (1892) - Nouvelles études d'histoire et de critique dramatique (1899) - Histoire de littérature et d'art (1894) - Etude de critique dramatique (1906) - Petits portraits et notes d'art (1900) - Derniers portraits (1904) - L'art et l'Etat en France (1895).

En discours d'inaugurations des monuments, de cérémonies scolaires ou officielles, de nécrologies, éloges et notices historiques à l'Institut on peut relever notamment les noms suivants : Alphand, duc d'Aumale, Prince Napoléon Bonaparte, Delaborde, Léo Delibes, Falguière, Octave Feuillet, Charles Garnier, Jean Houdon, Meissonnier, Gustave Moreau, Lepépreu, Sainte Beuve...

De même des impressions de voyages :

  • « Vers Athènes et Jérusalem », (Hachette 1898) reprenant des publications dans le Temps et dans le Figaro en 1896 et 1897.
  • La maison de Victor Hugo (Champion 1895).

Il y a enfin à signaler diverses participations telles que :

  • Encyclopédie populaire illustrée.
  • Préface et notices d'oeuvres ou de traductions.

Sur l' œuvre critique de Larroumet, on a justement fait remarquer qu'il s'est trouvé dans une époque où la critique était encombrée de célébrités, telles que Taine, Jules Lemaitre, Francisque Sarcey, Brunetière, Emile Faguet, Gustave Lanson, et bien d'autres.

Il est plutôt considéré comme un analyste préoccupé de détail, très universitaire et un peu scolaire.

Sa contribution la plus importante a été dans le domaine théâtral. Il a d'ailleurs comme critique théâtral du « Temps » succédé à Francisque Sarcey et précédé Adolphe Brisson.

Sans être un spécialiste, il a été aussi un bon critique d'Art.

L'ŒUVRE ET L'ACTION DANS LES BEAUX-ARTS (Retour)

La littérature et le théâtre d'une part, et les Beaux-Arts d'autre part se sont en fin de compte rencontrés dans celui qui fut professeur à la Sorbonne d'une part, et d'autre part Directeur des Beaux-Arts et membre de l'Académie des Beaux-Arts.

C'est à partir de 1881 que l'organisation du Salon fut remise par l'Etat aux artistes eux-mêmes constitués en société, et en 1890 qu'une scission entre deux sociétés rivales entraîna deux salons. Au poste qu'il a occupé, responsable des achats de l'Etat, Larroumet s'attira forcément des critiques. Il a exprimé son point de vue et ses difficultés dans son ouvrage « L'Art et l'Etat en France ».

L'art officiel, les critiques de l'enseignement à l'école des Beaux-Arts et du règne de la villa Médicis à Rome, Larroumet y fait allusion. C'était l'époque aussi où de nombreuses municipalités de Province, souhaitaient constituer un embryon de musée, sans toutefois y contribuer financièrement, du moins le moins possible, et où les municipalités sollicitaient l'influence de leurs « personnalités » montées à Paris, en sorte que l'on a vu s'éparpiller dans toute la France nombre d'oeuvres sorties des réserves ou des achats aux salons et de qualités très inégales. Ce phénomène a été étudié dans une série d' « Histoire du musée de Province au XIXè Siècle » (Pierre Angrand - Le cercle d'or -centre régional culturel et littéraire d'éditions - Les sables d'Olonne - Tome 3 - 1985).

Dans le tome 3 consacré au Sud-Ouest, au chapitre Quercy, il est particulièrement mis en lumière le rôle de Gustave Larroumet dans l'origine et le développement du musée de Cahors, et l'érection des monuments de cette ville. Il fut en 1888, une des personnalités, appelée par le projet d'érection d'un monument à Clément Marot.

Rappelons, à cette occasion, que Larroumet fut Président d'Honneur de la « Société des études du Lot » dont il présida en 1897 les fêtes du 25è anniversaire de sa création (Bulletin SEL tome 22). Sa nécrologie a paru dans le bulletin de cette association - tome 28 en 1903.

On peut noter enfin que la lecture de Larroumet étudiée spécialement du point de vue artistique, nous apporte une documentation sur les événements ayant concerné l'architecture, la peinture, la sculpture, tels que l'Opéra de Paris, la nouvelle Sorbonne (reconstruite entre 1885 et 1901, sauf la chapelle Richelieu), le Panthéon (restitué à son affectation « aux Grands Hommes » à l'occasion des obsèques de Victor Hugo) et l'oeuvre de Puvis de Chavannes. Deux mois avant sa mort, il inaugurait le monument de l'Opéra de Paris, consacré à la mémoire de l'architecte Charles Garnier.

LE PANTHÉON

On peut mettre en relief le rôle joué par Larroumet dans la mise en oeuvre du dernier programme de sculpture au Panthéon après la réaffectation laïque marquée par les obsèques de Victor Hugo en 1885. Ce programme avait fait l'objet d'un rapport (Imprimerie Nationale, 1889) dont Larroumet était l'auteur, de la Commission des Beaux-Arts sur le projet de décoration sculpturale du Panthéon.

Larroumet est d'ailleurs cité dans une brochure récente de la collection des Guides Thématiques édités par la Caisse Nationale des Monuments Historiques, Editions du Patrimoine « Peintres et Sculpteurs du Panthéon » (1997).

Il y est fait référence dans la bibliographie concernant le Panthéon au livre de Larroumet « L'Art et l'Etat en France » édité chez Hachette en 1895 et dont l'avant-propos indique qu'il a été écrit à Villecresnes le 22 septembre 1895.

Le rapport de 1889 était une suite au projet de 1874 du Directeur des Beaux-Arts d'alors, Chennevières, qui avait été en partie réalisé pour les peintures murales alors que la sculpture était à revoir et à faire.

Le projet de 1874 était d'inspiration religieuse et le Panthéon était encore alors affecté au culte. Il s'agissait de revenir à un voeu de la Constituante considérant que dans la continuation et sans antithèse, succède à l'influence du christianisme, partie intégrante de l'Histoire de France, une suite logique dans la sculpture de la France Laïque.

L'idée était de confier à l'Ecole de Sculpture des monuments funéraires des grands hommes ayant leur sépulture au Panthéon et d'autres ayant fait la France depuis Charlemagne, en ce compris Descartes considéré alors comme Père de la Pensée Moderne et pour réparer l'exclusion précédemment de son cercueil de l'Eglise Sainte Geneviève par ordre royal.

Notons que parmi les sculpteurs retenus sur les commandes de Larroumet (qui mort trop jeune n'en a pas vu la réalisation) figurent Bartholomé, auteur en 1899 du célèbre monument aux morts du Père Lachaise, ainsi que Injalbert, auteur d'un buste de Larroumet qui a figuré au Musée de Cahors.

LA MARQUISE ARCONATI VISCONTI

Larroumet a vécu dans un monde intellectuel où les salons avaient de l'importance. On a par exemple opposé celui de Juliette Adam plutôt conservateur, et celui de la Marquise Arconati-Visconti plutôt dreyfusard et anticlérical. Alors reproduisons ceci :

Carte, non datée, adressée par la Marquise Arconati-Visconti à Gustave Larroumet

Cette carte non datée a été adressée à Gustave Larroumet par la marquise Arconati-Visconti.

Ce nom de Visconti est celui d'une célèbre famille du milanais dont la descendance a abouti notamment au cinéaste Luchino Visconti.

Il est aussi celui de l'architecte du mausolée de Napoléon aux Invalides. Il aurait même servi à Stendhal et Paul Léautaud l'a fait figurer dans la liste des pseudonymes utilisés par ce dernier.

Ici, il s'agit de la veuve d'un marquis florentin Jean-Martin Arconati-Visconti décédé à Florence en 1876 sans héritier. Elle était française née Peyrat, d'un publiciste qui fut vice-président du Sénat et avait eu pour témoins à son mariage Victor Hugo et Léon Gambetta.

Le château de Gaesbeek, dont elle parle, situé en Belgique au sud-ouest de Bruxelles, lui provenait de l'héritage de son mari qui l'avait lui-même recueilli de son père en 1873, celui-ci l'ayant reçu d'un oncle célibataire le marquis Joseph Arconati-Visconti décédé à Bruxelles en 1823.

A l'époque ou se situe la carte, la marquise procédait à la restauration du château (1887- 1893). Postérieurement, elle en a fait donation à l'Etat belge en 1920/1921.

Il est actuellement avec son contenu en objets d'art, tapisseries et bibliothèque dans le patrimoine de la communauté flamande (1981).

La marquise Arconti- Visconti est un exemple du monde intellectuel et de l'entourage de Gustave Larroumet. Elle était d'une grande culture et s'intéressa aux oeuvres et institutions artistiques et scientifiques notamment des universités de Paris et de Strasbourg. Elle eut dans ses relations l'universitaire Gustave Lançon et le mathématicien Henri Poincaré. Elle a aussi été donatrice en France - voir : Hachette 1917 - catalogue de la collection Arconati-Visconti (donation au Musée du Louvre).

VILLECRESNES (Retour)

Il a déjà été fait allusion aux « Villégiatures » des parisiens. Villecresnes et la cité voisine de Mandres sont des exemples de cette fréquentation. Donc « hommes de lettres » Gustave Larroumet pour Villecresnes et François Coppée pour Mandres avaient séjourné dans la région avant d'acquérir une maison de campagne, notamment à Combs-la-Ville chez le sculpteur Eugène Delaplanche dont d'ailleurs, après son décès en 1891, ils soutiendront la veuve par des interventions auprès des Beaux-Arts.

C'est en 1890 pour l'un et en 1891 pour l'autre qu'ils vont faire leur choix de leur « résidence d'été » d'où ils fréquenteront aussi Daudet à Champrosay.

Voici la description de Villecresnes à cette époque telle qu'elle résulte d'un ouvrage édité en 1891 « Autour de Paris » par Louis Barron : « A l'Est des Camaldules, le Réveillon, affluent de l'Yères (sic), se fraye un chemin dans une vallée d'une fraîcheur et d'une grâce incomparables. Cette rivière, frétillant sous les aulnes et les saules d'argent, fait sur son passage éclore des champs entiers de roses, dont les parfums embaument Villecresnes et Mandres et le cirque nommé ‘Les Vallées’ d'où l'on voit aussi loin que les regards peuvent s'étendre, dans une perspective adorable, des collines et des vallons se dérouler mollement et sans bornes. Près des vallées est le hameau de Cerçay et dans ce hameau le brillant château du XVIIIè siècle où résidait le ministre favori de Napoléon III, Monsieur Rouher. Nous avons vu dans le parc de Cerçay les plus ténébreuses allées de hêtres centenaires... Descendons la côte de Cerçay, traversons Villecresnes aux chemins bordés de roses, nous toucherons les murs de Gros-Bois. La grille d'honneur du célèbre château... donne sur la grande route de Paris à Brie-Comte-Robert. En face s'étendent les bois à gauche la ferme de Toumebride, rendez-vous de chasse, de noces, de promeneurs, bien connu aux environs. »

Villa "les Peupliers" à Villecresnes Description idyllique d'un pays dont on comprend qu'il ait attiré « les parisiens à la campagne » tels Larroumet à Villecresnes et François Coppée à Mandres. Peut-être moins poétique pour les gens du pays, ruraux travaillant la terre, Villecresnes était alors une petite commune n'atteignant pas 900 habitants, population qui resta stable pendant des décennies, comme son maire de l'époque Sosthène Richerand (de 1871 à 1912) et son curé Dolente (de 1864 à 1902). Essentiellement agricole il n'y a pas que des bois et des roses il y a aussi des champs. Le bourg n'avait pas encore les lotissements et comprenait de grandes propriétés avec bois et parcs. Outre le château de Cerçay passé à Arnaud-Jeanti, il y avait notamment la propriété dite Desmarais (le Fief) et le « Château de Villecresnes » (Richerand), ainsi qu'Atilly (Bazire).

La région, d'ailleurs, grâce au train de la Bastille, allait être de plus en plus fréquentée comme lieu de villégiature du dimanche, notamment par la population de l'est parisien. L'examen de la correspondance du dos des cartes postales des années 1900 révèle d'ailleurs le caractère champêtre apprécié des visiteurs.

Larroumet habitait à Paris, 9 rue du Val-de-Grâce, et venait à Villecresnes aux « Peupliers », maison située dans ce qui est actuellement la rue de la Bourgogne, et ses séjours se situent entre 1890 et sa mort.

Cette maison a été décrite (Maurice Guillemot « Villégiatures d'artistes »" - Flammarion 1897) avec l'anecdote suivante : "Ils sont cinq autour de la maisonnette, fichés dans les angles du jardin, et c'est grâce à eux que la receveuse des postes de Villecresnes ayant demandé à M. Larroumet, alors directeur des Beaux Arts, de donner un nom à son habitation, qui était en dehors du village, fit ce portrait de villégiature a cette enseigne très champêtre. Ils sont cinq, jeunes élancés, cliquetant leurs feuilles, cinq sentinelles surveillant un buste de Clément Marot qui, sur sa stèle, repose en une sorte de petit kiosque rustique au toit de chaume.
Un salut à cette façon de dieu lare, et, dans le vestibule de la demeure, commence déjà le musée. C'est la Victoire de Samothrace, merveille de lyrisme vrai, de charme naturiste ; C'est des photographies, des gravures, des dessins, du classique avec du moderne, une indiscrétion murale des sympathies en art du jeune membre de l'institut. Toutes les pièces sont ainsi décorées, et d'une vision rapide, en une après-midi ensoleillée d'août, le regard se remémore : Un très beau buste de Gambetta, par Mercié, épreuve de celui qui a été placé dans le lycée de Cahors ; la fameuse eau-forte du portrait de Washington ; le bon Samaritain, de ce pauvre Chien-Caillou ; un cheval en bronze, de Frémiet ; une lithographie, d'après Jean-Paul Laurens, une gravure de la Source de Ingres, une autre de Watteau, et les quatre panneaux de Chéret. »

Maison de Gustave Larroumet à Villecresnes (photo 2005) Cette description nous livre quelques noms d’artistes, qui donnent une petite indication sur ses préférences personnelles, - ce qui ne vaut pas naturellement pour suffire à une étude critique.

Il y a tout d'abord deux grands personnages cadurciens : Clément Marot et Léon Gambetta. Le buste de Gambetta par Mercié, élève de Falguière et offert au Lycée de Cahors par le ministre Lockroy a été inauguré par Larroumet le 21 juillet 1888.

Nous restons dans le sud-ouest avec Ingres originaire et grand homme de Montauban et que Larroumet préférait à Delacroix.

Avec Jean-Paul Laurens nous retrouvons un peintre de « Sainte Geneviève - Panthéon » aux cotés de Puvis de Chavannes et de Lenepveu. En outre Jean-Paul Laurens faisait avec Larroumet partie des convives aux dîners gastronomiques des frères Mounet, aussi avec Fremiet, le sculpteur auteur notamment de statues équestres et aussi d'oeuvres funéraires, et avec Jules Chéret autre peintre et décorateur, notamment à l'Hôtel de Ville, mais qui a eu sa célébrité et son Musée à Nice, tout en étant inhumé aujourd'hui dans le petit cimetière Saint Vincent de Montmartre.

Et enfin un personnage assez curieux : Rodolphe Bresdin dit « Chien Caillou » (1822-1885), dessinateur et graveur qui intéressa Victor Hugo et Baudelaire.

La référence à Watteau est tout à fait à sa place puisque le rapprochement a été souvent fait entre les personnages de Watteau et ceux de Marivaux. Mais elle appelle ici, dans une recherche qui se rapporte à Villecresnes, une remarque : Un livre édité en 1929 (Taillandier) « Chroniques des temps d'après-guerre » d'un journaliste d'origine lilloise nommé Georges Ferré, préfacé par Henri Béraud contient un chapitre intitulé « Watteau et les poètes » où Villecresnes est mentionné parmi les lieux fréquentés. La référence à ce livre a été reprise dans l'ouvrage collectif « Le Patrimoine des Communes du Val-de-Marne » (Flohic 1993) au titre des sources spécifiques Watteau aurait peut-être connu Villecresnes à partir de Nogent puisque ce fut là selon son biographe Arsène Houssaye qu'il étudia « Dame Nature parée à la Française ».

Le texte de la chronique en question est le suivant : « Sans doute Watteau a emprunté au jardin du Luxembourg certaines perspectives aux campagnes des environs de Paris des profondeurs de verdure, aux parcs des châteaux, des bosquets et des marbres. Sans doute Vincennes et Boissy-Saint-Léger, Nogent-sur-Marne et Villecresnes, et surtout Montmorency lui ont fourni des motifs qui, traités et interprétés au mieux de sa fantaisie, devinrent les décors admirables de ses tableaux. »

Que cela ne nous empêche pas toutefois, même dans l'ignorance, de réunir autour du tombeau de Villecresnes les mânes de Watteau, de Marivaux et de Larroumet.

Quant à l'intérieur de la maison de Villecresnes envahi de bibelots et d'objets d'art, c'est très exactement l'identique des descriptions faites dans d'autres documents de son appartement de Paris (Revue Illustrée 1896), rue du Val de Grâce. Cette apparence de bric-à-brac était à l'époque tout à fait à la mode dans les pièces où le moindre dm2 servait à la pose d'un tableau ou d'une gravure, et où la cheminée et les étagères étaient encombrées d'objets décoratifs.

C'est une occasion pour signaler que Larroumet a défendu l'art décoratif et notamment Gallé révélé en 1889.

Dans le calme d'une campagne encore champêtre, Gustave Larroumet a certainement écrit à Villecresnes ou mis au point les éditions de ses oeuvres, ainsi qu'en témoigne entre autres son livre « La maison de Victor Hugo - Impression de Guernesey » (Champion 1895) daté à Villecresnes de septembre 1894.

Gustave Larroumet dans son jardin de VIllecresnes Il fut voyageur et à Villecresnes il pratiquait la promenade à pied, à bicyclette et à cheval, dont l'écurie était à Tournebride de Gros Bois. C'est à Gros Bois qu'il venait avant l'achat des Peupliers. Il sera question plus loin du voisinage avec François Coppée à Mandres.

On trouve dans François Coppée des récits de promenades à travers des paysages qui sont les mêmes que Larroumet. "J'ai fait un grand tour par Cerçay où sur la longue terrasse du château les tilleuls taillés... ont le ton fauve... par les Bois de la Grange où les fougères flétries semblent de cuivre rouge... J'ai descendu jusqu'à Brunoy:.. Je suis revenu par le plus long chemin, le long de l'Yère... Les villas déjà closes... les canots amarrés... évoquaient le souvenir de l'été disparu, les pêcheries, des baignades, des rameurs aux bras nus... pour gagner le plateau j'ai gravi l'étroit sentier à travers les vergers... la saison était finie, les vignes vendangées et le pommier à cidre, le seul à avoir encore des fruits rouges... » et il décrit aussi l'animal qui traîne chaque jour la charrette des maraîchers du pays qui sont aussi des rosiéristes. (Dans « Mon Franc Parler »").

FRANÇOIS COPPÉE (Retour)

Et l'on ne peut pas parler de Larroumet à Villecresnes sans évoquer un autre personnage de la même époque qui lui aussi venait à la campagne : François Coppée à Mandres exactement à la même période.

Tout en faisant en incidence, cette réflexion où il ne s'agit plus de parler de Mandres à propos de Villecresnes, mais de Villecresnes à propos de Mandres. A cause de François Coppée, un villecresnois Jules Lemaitre honoré à Villecresnes d'une place portant son nom, s'est vu reprocher d'avoir été avec François Coppée membre de la Ligue des Patriotes, donc antidreyfusard. Dans sa hargne le chroniqueur de Mandres n'avait pas été chercher plus loin. Notre cher villecresnois était d'une autre époque, et a été honoré comme créateur de « L'Avenir de Villecresnes » lié aux trompettes des halles. Il a eu droit à un hommage posthume par une partition pour trompettes de cavalerie intitulée « Le Grand Chef ». Quant au Jules Lemaitre incriminé (1833-1914) il a été cité dans les références littéraires effectivement contemporain de Coppée et de Larroumet. Son « Racine » a d'ailleurs été considéré comme supérieur à celui de Larroumet.

François Coppée François Coppée né en 1842, donc aîné de Larroumet est venu à Mandres, à la Fraizière à la même époque que Larroumet à Villecresnes en 1891 et jusqu'à 1897, date à laquelle son état de santé l'obligera à rester à Paris où il décédera en 1908, cinq ans après Larroumet.

Coppée était bibliothécaire de la Comédie Française, à l'époque où Larroumet travaillait sa thèse et son livre sur Marivaux et figure parmi les personnes que Larroumet remercie dans l'avertissement de son ouvrage.

Poète, mais aussi écrivain dramatique, Coppée a été joué à l'Odéon où Larroumet fut conférencier, et on trouve chez Larroumet, articles et dédicaces concernant Coppée. Ils étaient tous deux membres de l’Institut, Coppée de l'Académie Française (1884) et Larroumet de l'Académie des Beaux-Arts. Ils ont ensemble fait les discours d'inauguration de la statue de Sainte-Beuve à Paris.

Larroumet n'était pas à l'Académie Française, mais en prenait le chemin probablement soutenu par Coppée !

Dans son livre « La vieille dame du quai Conti » le Duc de Castries donne en 1901 Larroumet comme favori au fauteuil de Henri de Bornier. Il revint à Edmond Rostand.

Ces deux parisiens de santé fragile, à la recherche du repos dans une campagne qui n'était pas encore une banlieue, mais que la voie ferrée rendait accessible, n'étaient séparés l'un de l'autre que par une station et leurs maisons respectives se trouvaient à quelques kilomètres l'une de l'autre.

Se fréquentant à Paris Larroumet et Coppée ne s'ignoraient pas à la campagne. Mais il y a quelque chose qui les rapproche : ils sont l'un et l'autre décédés après une longue et pénible maladie : Larroumet d'une laryngite tuberculeuse (sic), Coppée d'un cancer de la langue, et ils ont l'un et l'autre fait l'apprentissage de la souffrance sur le retour en arrière qu'il comporte.

Coppée avait été très malade en 1897 lorsqu'il quitta Mandres, à l'époque où il écrivit « La Bonne Souffrance » il survivra cependant à Larroumet jusqu'en 1908.

Larroumet connaît en 1901 les symptômes de la maladie qui l'emportera et l'on peut lire dans un article de La Gazette des Beaux Arts en 1911 concernant Emile Bertaux et sous la plume de Léon Bertaux son frère cette information à propos du mariage d'Emile Bertaux avec Jeanne Larroumet : « Les fiançailles eurent lieu à l'Institut le jour de la réunion des cinq académies, au cours de laquelle Gustave Larroumet devait prononcer le discours traditionnel sur les prix de vertu. Le Président faisait savoir que Larroumet, présent à la réunion, avait une forte extinction de voix et ne pouvait lire lui-même son discours, qui serait lu par François Coppée. En réalité, Larroumet savait qu'il était atteint d'une laryngite tuberculeuse : en sursis de deux ans, de cruelles souffrances qu'il supportera avec un admirable courage. »

On peut rapprocher ce témoignage de ce que dit Edmond Rostand, l'élu de l'Académie Française, sur celui, qui mort trop jeune n' y entrera jamais ! "J'ai déjà vu mourir, jamais comme cela, je regrette de n'avoir pas connu plus tôt un homme dont on pouvait être sûr à ce point qu'il préférait certaines choses à la vie."

On a qualifié la mort de Larroumet de stoïcienne. Dans un échange avec une journaliste paru dans la Mode Illustrée de 1901 Larroumet se réfère à son livre « Vers Athènes et Jérusalem ». Il rapporte un ‘examen de conscience’ où l'on sent la contradiction derrière un certain scepticisme par rapport à l'histoire, non seulement de son époque, mais aussi de deux siècles antérieurs N'oublions pas qu'il a vécu dans une époque intellectuellement brillante mais politiquement perturbée et toujours marquée par la défaite de 1870. Mais il conclut nettement à la référence de ses racines : « Chrétien et Français », respect de la foi et amour de la patrie : « La cloche qui a sonné à ma naissance sonnera à ma mort et sur ma tombe sera dressée la croix. »

Mais celle de Larroumet n'est pas « La vieille croix s'effrite au fond du cimetière » (François Coppée sur une tombe au printemps).

Et nous voici de retour à notre point de départ : la tombe au cimetière qui appelle d'autres commentaires.

Le monument funéraire de Gustave Larroumet à Villecresnes est décoré de deux médaillons de part et d'autre sur les supports du gisant. Il s'agit des deux gendres de Larroumet.

Hippolyte, Paul, René dit Paul Roussel (1867-1928).

Auguste, Joseph, Emile Bertaux (1869-1917).

Une notice sur ces deux personnages avec un complément d'informations sources est donc un document normal pour une étude sur Larroumet faite à partir du monument funéraire et d'autant plus à sa place que Paul Roussel, dans le domaine de la création artistique, et Emile Bertaux, dans celui de l'Histoire de l'Art, ont été proches des activités de Gustave Larroumet, en même temps que membres de sa famille. Tous deux étaient passés par Rome, l'Ecole Française et la Villa Médicis.

ÉMILE BERTAUX (Retour)

Emile Bertaux, medaillon tombe de Villecresnes

Le plus jeune Emile Bertaux né à Fontenay-sous-Bois le 23 mai 1869, est Normalien en 1888 (Edouard Herriot sera un de ses jeunes condisciples). Agrégé, il est en congé en 1892 à l'Ecole Française d'Athènes, puis à celle de Rome. Sa thèse très importante sur « L' Art de l'Italie méridionale » sera publiée en 1904 avec dédicace à Gustave Larroumet, décédé, dont il avait épousé la fille Jeanne en 1901. Il enseigne l'Histoire de l'Art aux Facultés de Lyon et de la Sorbonne et sera considéré comme un grand historien de l' Art Roman-Gothique en Italie et des Arts également en Espagne et au Portugal. Son portrait a d'ailleurs figuré dans un musée de Barcelone.

Désigné d'une façon inattendue pour organiser le Musée Jacquemart-André après le legs fait en 1912 par Madame André (Nélie Jacquemart) inauguré en 1913, la Guerre ne lui permettra pas de réaliser ses projets.

Officier interprète et aussi affecté à l'aéronautique, il effectua des missions notamment sur le front italien à Gorizia où il retrouve Gabrièle d'Annunzio. Il est décédé le 8 janvier 1917 à 47 ans d'une maladie contractée dans une mission dans la Somme. Son nom est inscrit au Panthéon sur le mur à la mémoire des écrivains morts pour la France. Sa nécrologie a paru en janvier 1917 dans la « Gazette des Beaux-Arts » dont il avait été Rédacteur en Chef. Il y est reproduit l'image du médaillon. Un recueil à sa mémoire « Mélanges Bertaux » (édition de Borrard, 1924) contient une contribution signée A. Roux sur « La Physionomie artistique de Gustave Larroumet ». Aux archives du Musée Jacquemart-André, on peut consulter un document émanant de son fils Jacques Bertaux (1902-1983, aussi inhumé à Villecresnes) parlant du projet de catalogue du Musée et précisant en 1973 que les archives de son père étaient à la Faculté des Lettres de Lyon.

Pour conclure sur la notoriété d'Emile Bertaux, on peut noter qu'il figurait encore dans le "Petit Larousse" des années 1950. En outre il peut être considéré comme le premier conservateur du Musée Jacquemart-André.

PAUL ROUSSEL (Retour)

Hippolyte, Paul, René Roussel, qui signera sous le nom d' artiste « Paul Roussel », né et mort à Paris (1867-1928), obtint un Premier Prix de Rome en 1895 avec un bas-relief « Saül et David vainqueur de Goliath ».

Pensionnaire de la villa Médicis à Rome de 1895 à 1899, il eut ensuite son atelier à Paris, en dernier lieu, à partir de 1905, villa Montmorency, 7, rue des Peupliers. Il y travaillait seul au rez-de-chaussée.Paul Roussel, medaillon de la tombe de Villecresnes

Les sources relatives à Paul Roussel comportent : La documentation du fonds Paul Roussel au Musée d'Orsay, comprenant de nombreuses photographies et les références aux catalogues et ouvrages sur la sculpture où l'on peut glaner la citation de son nom avec la nomenclature de ses oeuvres et quelques extraits de citations de critiques.

  • Revue des Arts Décoratifs (1898)
  • Exposition Internationale de 1900 (catalogue)
  • Art et Décoration (1903 - 1909 - 1921)
  • Journal de la Marbrerie et de l'Art Décoratif (1907)
  • Journal des Débats (1908)
  • Petit Palais : catalogue Gronkowski (1927)
  • Recueil des modèles de la manufacture de Sèvres (1932)
  • Musée du Mans catalogue (1932)
  • La Sculpture Française au XIXe siècle : Grand Palais (1986)
  • - Les Bronzes au XIXe siècle : P. Kjellberg : dictionnaire des sculptures (1987)
  • Les monuments aux morts de la Première Guerre Mondiale (Documentation Française 1991)
  • Gilles Plum : Le Grand Palais
  • L'Aventure du Palais des Beaux Arts : Paris RMN (1993)
  • Mémoire de Marbre - La Sculpture Funéraire en France : Bibliothèque Historique de la Ville de Paris (1995).

Sans entrer ici dans le détail de Paul Roussel, faisons maintenant quelques remarques autour de certaines de ses œuvres.

DAVID ET GOLIATH

David, vainqueur de Goliath, amené en triomphe et présentant à Saül la tête de Goliath, bas-relief. C'est le sujet du Premier Grand Prix de Rome de Paul Roussel en 1895Paul Roussel : "Saül et David vainqueur de Goliath" bas relief, 1er prix de Rome en 1895.

Le sujet et le style sont caractéristiques de l'art officiel et de l'enseignement de l'Ecole des Beaux Arts de la seconde moitié du XIXè siècle et correspond aux images et photographies que l'on peut contempler des salons de la sculpture de cette époque.

Gustave Larroumet a abordé dans ses articles et dans « l'Art et l'Etat en France » ce sujet.

NONIA, DANSEUSE À POMPEI

Cette oeuvre fut exposée en 1906 en statue de plâtre et en 1901 en statue de bronze. L'historien Paul Vitry, autorité de l'époque dans la critique d'art, a exprimé l'opinion suivante «  ... apprécions comme il convient la finesse nerveuse de la Nonia de Monsieur Roussel » (Art et Décoration II, 1909). La statuette en bronze à cire perdue figure dans le catalogue ‘Camille Gronkowski’ du Petit Palais en 1927. Elle a figuré à la manufacture de Sèvres en 1907 et le musée Adrien Dubouché de Limoges en 1908 a bénéficié d'un don de l'Etat.

L'ETOILE DU BERGER

Cette statue en marbre peut se contempler à Agen sur la « Promenade du Gravier », esplanade qui conduit vers la Garonne. Réalisée en 1901 et achetée 7000 F pour la ville d'Agen le 24 février 1902. Une maquette de plâtre avait été adressée au musée Rapin de Villeneuve-sur-Lot, ville originaire de la famille maternelle de l'épouse de Paul Roussel. Une réduction en biscuit de Sèvres a figuré dans le recueil des modèles.

Salon 1906 : Nonia, danseuse ; La coupe Michelin "Triomphe de l'aviation" ; L'Etoile du Berger

LE DUC D'AUMALE

Au Louvre, la statue du duc d'Aumale se situe dans la 17è niche, une des dernières occupées avant les vingt-deux niches restées sans attributaire et donnant sur la rue de Rivoli. Il s'agit de la partie reconstruite après l'incendie pendant la Commune, alors que ce qui restait du palais des Tuileries lui même a été démoli en 1884. Un petit modèle en plâtre existe au musée de Chantilly. Le duc d'Aumale a joué un rôle considérable dans la restauration, la conservation du Patrimoine et par le don du domaine de Chantilly à l'Institut de France.

SURTOUT DE TABLE POUR LE CUIRASSÉ « PARIS »

Ce surtout, acquis par la ville de Paris pour être offert au navire de guerre, le cuirassé « Paris », est un exemple des objets d'art décoratif dont Paul Roussel fut créateur comme beaucoup de sculpteurs de son époque.

Dans le même ordre d'idées, on peut citer:

  • une coupe pour le Jockey Club,
  • une coupe Michelin pour l'Aviation (bronze 1900),
  • des bronzes édités par la fonderie Susse, dont « le Papillon », un vase « Fée aux Roseaux », etc.
p>Parmi les objets décoratifs, un plat d'étain « Le Bain Interrompu » est très original. Il avait été envoyé de Rome en 1898. La revue des « Arts Décoratifs » de juillet 1898 en fait le commentaire suivant : « Le plat de Monsieur Roussel ‘Le Bain Interrompu’, où se voit une fillette nue fuyant, au rebord, devant un monstre qui de l'autre côté se recourbe en enserrant quelque chose de piquant... ». Rappelons également, à propos des Arts Décoratifs, que son beau père Gustave Larroumet, a soutenu cet art et que l'on trouve dans ses discours de directeur des Beaux Arts de nombreuses interventions dans les écoles et les chambres syndicales des professions axées sur les arts décoratifs.

PAUL ROUSSEL ET LES MÉDAILLES

Dans le supplément n° 87 du 5 juin 1907 du Journal de la Marbrerie et de l'Art Décoratif, on pouvait lire : "Outre les envois dans la section sculpture, Monsieur Paul Roussel s'est fait remarquer aussi dans la section des médailles, où il expose le médaillon de Monsieur Charles Diehl, professeur à la Sorbonne, une plaquette de Saint Christofle (sic), le patron qui protège les automobilistes... quand ils font moins de 50 à l'heure".

Signalons que Charles Diehl sera l'auteur en 1917, dans la Gazette des Beaux Arts, de l'article nécrologique sur Emile Bertaux, autre gendre de Larroumet et beau-frère de Paul Roussel (article repris en 1924 dans « Mélanges Bertaux » E. de Boccard Editeur).

Sur les médailles on peut effectivement lire dans une note du dossier relatif à Paul Roussel, au musée d'Orsay, la référence d'un certain nombre d'oeuvres exposées au Salon des Artistes Français, concernant des effigies de caractère privé pour un travail rémunéré.

"Médaille Miraculeuse" de la rue du Bac par Paul Roussel Signalons qu'il a été communiqué par la descendance de Paul Roussel, une médaille, ne figurant pas dans les énumérations ou documents de son dossier au musée d'Orsay. Il s'agit d'un modèle de la médaille dite « Médaille Miraculeuse » de la rue du Bac exécutée vers 1905 et différente, tout en restant très traditionnelle, de la médaille d'origine de 1832, alors frappée par Adrien Vachette. Elle porte la signature de son auteur « Paul Roussel » au revers et à l'avers. Cette médaille a été commercialisée par Boucasse Jeune et Cie, Editeur, 12, place Saint-Sulpice, accompagnée d'un document reproduisant un carton imprimé leur accusant réception, avec les compliments du Saint Père, en date du 25 novembre 1905 émanant de l'Anticamera Pontificia ainsi rédigé : « Messieurs, le Saint Père a bien reçu la belle et artistique médaille que votre piété filiale lui a fait présenter. Sa Sainteté a admiré la religieuse inspiration et le fini de ce beau travail. Elle me charge de vous exprimer toute sa satisfaction et de vous dire qu'Elle bénit affectueusement le jeune artiste qui l'a exécuté et les éditeurs qui ont voulu lui offrir l'hommage » Signé du Maître de Chambre de Sa Sainteté Monseigneur Bisleti.

Les services des « Filles de la Charité » de la rue du Bac interrogés, ont répondu n'avoir pas trouvé trace en archives de cette médaille. Il est probable qu'il s'agit d'une commande d'éditeur, soit directe, soit sur appel d'offre, dont a alors bénéficié Paul Roussel. Cet exemple peut illustrer les moyens d'existence des artistes dans l'exercice de leur art.

LARROUMET ET PAUL ROUSSEL SUR LES MONUMENTS COMMÉMORATIFS ET FUNÉRAIRES EN GÉNÉRAL
ET CEUX DE VILLECRESNES ET DE LA COMÉDIE FRANÇAISE EN PARTICULIER. (Retour)

En fin de l'étude sur Gustave Larroumet, il peut être rapporté des commentaires et réflexions sur les monuments commémoratifs. « La mémoire et l'art funéraire ». Paul Roussel, gendre de Larroumet et sculpteur, fut d'ailleurs dans son activité un créateur de ce type de monuments soit réalisés, soit sous forme de projets et soumissions à des mises au concours, dont on trouve l'énoncé dans son dossier du Musée d'Orsay. Il fut l'auteur de nombreux bustes et portraits de personnages plus ou moins célèbres, dont le duc d'Aumale (rue de Rivoli Tuileries) et plus tard de monuments aux morts après la guerre de 1914. Sculpteur du monument funéraire de Gustave Larroumet à Villecresnes, il fut d'ailleurs l'auteur sur ce monument du médaillon de son beau-frère Emile Bertaux, mais aussi de son propre médaillon.

On a beaucoup glosé sur les monuments commémoratifs et funéraires. Alfred Jarry avait écrit à ce sujet dans « La Renaissance Latine » du 15 novembre 1902 (La Chandelle Verte oeuvres d'Alfres Jarry - La Pléiade) un article très irrévérencieux intitulé « Le Monument de Boulaine » dans un pastiche à propos de Baudelaire, tout en faisant toutefois un rapprochement entre les gisants et l'art funéraire égyptien. Sa conclusion était : « Quant à la statue de Boulaine, elle sera toute prête pour le cas ou le besoin se ferait sentir particulièrement de la réhabiliter un jour. »

Il ne s'agit pas ici de « réhabiliter » Larroumet, mais précisément et à l'occasion tant d'un développement des études sur l'art du XIXè siècle, due à la création d'Orsay, que de la recherche spécifique à Villecresnes d'une association d'Histoire locale, de faire « reparaître Larroumet ». Ce monument date de 1904. Son bas-relief, alors destiné au tombeau de Larroumet, a été exposé au Grand-Palais, Salon des Artistes Français, cette année là.

Dans un livre édité récemment par la Bibliothèque Historique de la Ville de Paris (1995) « Mémoire de Marbre - La sculpture funéraire en France 1804-1914 » d'Antoinette Le Normand-Romain, figure, page 208, une photographie ancienne avec la référence au Salon. Curieusement dans la nomenclature alphabétique, page 421, la référence à Villecresnes est mentionnée avec un point d’interrogation !

Le monument qui figure sur cette photographie ne comporte pas encore naturellement les deux médaillons. Cette photographie figure aussi dans la documentation du Musée d'Orsay au Fonds « Paul Roussel ».

Le livre susénoncé « Mémoire de Marbre » rapporte une opinion de Paul Vitry, qui était à l'époque un influent critique d'art. Cette opinion paraît assez réservée, jugeant médiocre le panorama sur l'Institut. Mais le gisant en question est tout de même indiqué comme un des premiers à reproduction réaliste inspiré de Rude.

En outre, dans le dossier d'Orsay, on trouve cette autre opinion : « Le monument n'a pas la banalité de ses congénères ; on le sent inspiré par la piété filiale » (article de ‘l'Action’ - Petit cahier 1904).

Il est donc facile de dire que Larroumet n'aurait pas eu de monument funéraire s'il n'avait pas eu de gendre sculpteur, mais convenons aussi que sans Larroumet et Paul Roussel, Villecresnes n'aurait pas un monument funéraire répertorié et pris maintenant en compte dans les références de sculpture du patrimoine du Val-de-Marne.

Le monument de Larroumet existe dans le cimetière de Villecresnes, plutôt méconnu. Si Larroumet avait été inhumé au Père Lachaise, son tombeau serait dans le guide de ce cimetière et serait visité à ce titre, comme tous les autres, et comme relevant de l'art funéraire, et des curiosités que cet art comporte.

Tombe de Gustave Larroumet à Villecresnes Alors, que l'on apprécie ou non le style, reconnaissons cette curiosité du cimetière de Villecresnes.

Et puisque, statue à Paris et gisant à Villecresnes, se réunissent à propos d'un personnage quelque peu oublié, citons deux réflexions.

La première, et cela nous ramène aux sources de Larroumet dans le Quercy, cette phrase extraite d'un discours prononcé en 1925 par Anatole de Monzie, alors ministre de l'Instruction publique, lors de l'inauguration d'une stèle à Luzech (Lot) à la mémoire de Lefranc de Pompignan (1925). « Le nombre des statues élevées à chaque Français illustre n'est pas en proportion de sa gloire ». Réflexion dont on peut à loisir apprécier l'ambiguïté, mais qui n'est pas déplacée à propos d'un homme qui a lui même tant inauguré de monuments.

Et l'autre réflexion pour terminer ce texte inattendu d'un humoriste contemporain. « La concession et la pierre tombale ne correspondent qu'à un terrain, et qu'aux fondations de la dernière demeure, c'est éventuellement le monument érigé dessus, voire les oeuvres d'art qu'on y a installées en sentinelles, qui différencient des autres un caveau et qui prolongent pour tous les siècles à venir le standing gagné en quelques décennies » (signé Philippe Bouvart, Figaro Magazine, 5 avril 1996).

Cette étude avait été préparée avant que ne paraisse l'ouvrage « D'ombre, de bronze et de marbre » publié par l'inventaire du Val-de-Marne (Images du Patrimoine), mais avait été communiquée dans sa précédente rédaction à Véronique Belle, auteur principal de l'ouvrage rencontrée en plein travail de documentation dans le cimetière de Villecresnes. Dans cet ouvrage se trouve (page 30) juste après une référence au tombeau de Larroumet en tant que rare exemple de sculpture funéraire dans le Val-de-Marne, un extrait du poète Jacques Delille à propos des représentations allégoriques de couronnes et de fleurs :
« Et si jamais tu te reposes
Dans ce séjour de paix, de tendresse et de deuil,
Des pleurs versés sur mon cercueil
Chaque goutte en tombant fera naître des roses »

François Coppée aussi dans « une tombe au printemps » avait évoqué les roses :
« 'Aujourd'hui n'as-tu pas un destin aussi beau
Si ton esprit épars autour de ce tombeau
Chante avec les oiseaux et fleurit dans les roses »

Villecresnes au temps de Larroumet commençait à être le pays des rosiéristes. Evoquons les donc, quoique la tombe de Larroumet s'orne plutôt de feuilles de lierre. Mais la citation de Delille nous amène à une autre réflexion. Dans le cimetière de Villecresnes, à quelques pas du tombeau de Larroumet se trouve, plus discrète et moins entretenue, la tombe de Vincent Campenon, ancien propriétaire du château Gaillard, poète néoclassique, disciple de Delille et son successeur à l'Académie Française, l'un ayant composé « La Maison des Champs » et l'autre « L'Homme des Champs ». Si l'on ajoute que l'éloge funèbre de l'Abbé Delille fut prononcé par Regnault de Saint d'Angely, qui avait un lien familial d'alliance avec le Général Baron d'Empire Delabassée, dont la tombe est aussi au cimetière de Villecresnes.

Si l'on note encore que l'une des références de Delabassée fut sa présence à Marengo et si l'on s'aperçoit que Larroumet fut coauteur avec Alberto Lumbroso d'un ouvrage édité à Milan en 1900 pour le Comité International du centenaire de la Bataille de Marengo... A ces remarques que l'on peut attribuer à la fantaisie d'un chercheur impénitent, on peut aussi reprendre avec François Coppée : « Les pierres parlent à qui sait les entendre ».

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