"L'origine du monde" assigne Facebook en justice

Facebook a fait désactiver le compte d'un internaute français qui avait publié une reproduction de l'oeuvre. Ce dernier proteste.

Le Point.fr

"L'origine du monde" a été peint en 1866 par Gustave Courbet pour entrer dans la collection que le diplomate turco-égyptien Khalil Bey avait dédiée à la gloire du corps féminin. © AFP

Temps de lecture : 2 min

Quelques mois après avoir temporairement exclu un artiste danois qui avait publié sur son profil une reproduction de L'origine du monde de Gustave Courbet, Facebook a fait désactiver le compte d'un internaute français pour la même raison. Mais, là où le premier s'était platement excusé avant de retirer l'image, le second a décidé, lui, de déposer une assignation devant le tribunal de grande instance de Paris pour atteinte à la liberté d'expression.

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Le plaignant, qui avait, selon son avocat Me Cottineau, quelque 800 amis, a vu son compte désactivé par "une censure aveugle" la veille de son anniversaire et estime en conséquence avoir subi un préjudice, d'autant que ses mails de réclamation sont restés sans réponse. Il "s'est senti associé à une personne qui ne serait pas digne de considération ou qui aurait des moeurs ou des pratiques interdites par la loi", note l'avocat, rappelant que son client "homme droit, cultivé et très attaché à la transmission du savoir" est professeur des écoles et père de trois enfants. La photo du tableau de Gustave Courbet renvoyait à un lien permettant de visionner un reportage sur l'histoire de ce tableau diffusé sur la chaîne de télévision Arte. Le plaignant, résidant à Paris, utilisait le réseau social "pour transmettre sa passion pour l'art", selon l'avocat.

"Facebook ne fait pas la différence entre ce qui est de la pornographie et une oeuvre d'art (1886) incontestable, montrée aux enfants tous les jours au musée d'Orsay", regrette Me Cottineau, qui espère faire reconnaître la compétence du juge français pour statuer sur le litige, malgré les conditions générales du contrat Facebook donnant compétence exclusive au tribunal de Santa Clara en Californie pour tout procès. "Ça m'apparaît totalement illégal, comme une clause abusive" qui, de fait, empêche Facebook d'être tenu pour responsable d'une de ses actions par exemple en France", souligne Me Cottineau qui réclame 20 000 euros au titre des dommages et intérêts. La procédure pourrait durer au moins un an.

Commentaires (9)

  • pseudo

    Enfin, est-ce un combat pour la liberté d'expression ou bien une opportunité de gagner plus d'argent.
    [... ]Le plaignant, qui avait, selon son avocat Me Cottineau, quelque 800 amis, a vu son compte désactivé par "une censure aveugle" la veille de son anniversaire et estime en conséquence avoir subi un préjudice qui vaut 20 000 euros.
    Bon, c'est clair que le prof ne cherche pas à restituer son compte, mais il cherche un buzz et un paquet d'argent.
    Il faut souligner que l'art est relatif et ce que certains aiment, d'autre ne l'aiment pas.

  • axel x

    Facebook n'est pas un espace de liberté, c'est une entreprise privée qui contrôle des relations souvent vides de sens, entre individus qui se racontent ce qu'ils n'avaient pas besoin de se dire. Et cette marque est soumise aux influences et aux tabous de tous ses clients, ce qui ne laisse que peu d'espace pour exprimer autre chose que des mondanités, le genre de dialogue que l'on tient dans les vernissages ou les réunions de familles auxquelles on assiste sans plaisir. "L'origine du monde" est sans doute proscrite sur le site parce que les webmasters devenus puissants par leur capacité à décider du bien et du mal, du moche et du beau, pensent que l'origine du monde tient dans un code numérique, dans l'idée originelle de proposer à nous autres, quidams "webophages", de changer notre vie en apprenant ce que fait notre premier amour perdu de vue il y a bien longtemps. Cette oeuvre picturale est emblématique quant au décalage entre l'"humanité civilisée" qui repose sur l'image et la communication et la réalité animale de notre condition de mortels, puisque en vérité, nous ne naissons ni dans les choux ni dans les profils facebook, mais dans cet endroit charnel que nous cherchons à retrouver toute notre vie. Que ce tableau soit interdit sur ce réseau "social", tant mieux, cela laisse encore un peu de place pour ce que nous sommes, du sang des larmes et autres créations biologiques qui ne seront jamais possédées par les multinationales à la mode...

  • effaré

    Le sexe est un tabou généralisé. Le sexe dans l'art est un tabou de la bienpensance. Mais un site doit pouvoir arbitrer les contenus qu'il héberge, fussent-ils tabous ou pas. Ce droit de regard du site est encore un tabou d'une bienpensance qui a tendance a prendre son étroitesse d'esprit pour quelque chose d'universel. En dehors de ces nombreux tabous, hypocrisies et autres voilages de face, le problème est strictement légal. Jusqu’où la loi doit-elle intervenir ? A partir du moment où la justice estime qu'il y a pornographie d'une part, et qu'elle est accessible au public contre sa volonté d'autre part, il semble normal que la loi intervienne a des degrés divers. Or concrètement ces deux conditions sont rarement réunies. Un site, bien qu'ouvert au public, peut nécessiter une inscription, cad un contrat privé qui engage les deux parties. Il y a accord sur les règles fixées par le site, fussent-elles arbitraires, et donc volonté tacite de l'utilisateur d’accéder a un espace privatif. Que ces règles soient jugées néfastes ou lacunaires n'est pas la question. L'important est qu'il y ait un contrat privé, un contrat accepté par l'utilisateur qui l'expose éventuellement a de la pornographie, ou a de la censure, suivant les cas. Aujourd'hui la justice française viole ce principe de contrat et considère que tout est public, or personne ne bronche.