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Hausse des prix: il y a beaucoup d’annonces pour lutter contre mais qu’en est-il réellement?

Prix bloqués, « shrinkflation », renégociations… Les mesures annoncées par le gouvernement pour lutter contre la hausse des prix dans l’alimentaire offrent peu de garanties de véritables baisses de prix, même si l’inflation donne des signes de ralentissement depuis quelques mois.

Temps de lecture: 4 min

> Un prix bloqué est-il forcément une affaire ?

Prix bloqués, voire en baisse, pour 5 000 références jusqu’à fin décembre : c’était l’annonce du ministre de l’Économie Bruno Le Maire fin août sur France 2, après échanges avec les représentants de l’agro-industrie et de la grande distribution.

Cela fait déjà plusieurs mois que les Français voient des affichages vantant des «  prix bloqués » ou des «  prix en baisse » dans les rayons de leurs magasins ou dans des publicités. Mais rien n’empêche un distributeur d’annoncer des « prix bloqués » juste après les avoir augmentés.

Ces annonces interviennent après plusieurs mois de nette hausse. Il y a quelques semaines, le spécialiste de la consommation Olivier Dauvers prenait l’exemple des huiles Lesieur, propriété du groupe Avril, cité par Bruno Le Maire comme bon élève pour avoir effectivement baissé ses prix.

L’expert a bien relevé une baisse des prix «  depuis quelques mois », de l’ordre de 3 %, mais cela n’empêche pas la bouteille d’huile d’un litre d’afficher un prix environ 1 euro plus cher que 18 mois plus tôt, début 2022. Idem pour les pâtes, dont les prix ont un peu baissé après avoir bondi.

> Quel est l’impact de la « shrinkflation » ?

Bruno Le Maire vise aussi un encadrement de la « shrinkflation » (du verbe anglais shrink, rétrécir), une pratique marketing qui consiste à masquer la hausse de prix de produits en réduisant les quantités vendues pour le même tarif.

Cette pratique est légale à condition que la mention du poids de la denrée soit modifiée. Mais elle peut induire en erreur les consommateurs, comme le déplorait l’association Foodwatch dans une campagne de sensibilisation du public.

La responsabilité est partagée : si c’est l’industriel qui détermine les quantités dans l’emballage, c’est le distributeur qui fixe le prix en rayons ; et les deux se sont accordés contractuellement à la fois sur le prix et sur les quantités.

Et ce n’est pas forcément pour tromper le consommateur que les fabricants changent les quantités : cela peut être pour s’aligner sur la concurrence ou pour éviter de franchir un seuil de « prix insultant », qui détournerait le consommateur du produit.

À ce jour, le phénomène n’est pas massif : le distributeur Carrefour, qui a décidé de signaler les produits concernés par de la « shrinkflation », l’a fait en ce début de semaine pour une petite trentaine de références. Un meilleur affichage n’aura pas grande incidence sur le pouvoir d’achat : le consommateur saura simplement que, pour le prix qu’il payait quelques mois plus tôt, il aura moins du produit convoité.

> Une renégociation supermarchés/industriels profitera-t-elle aux clients ?

Il est prévu d’accélérer le calendrier des négociations annuelles entre les supermarchés et leurs fournisseurs de l’agro-industrie. Objectif théorique : répercuter au plus vite les baisses des prix de gros dans les rayons.

Mais les industriels, gros comme petits, assurent que leurs coûts restent élevés. Dominique Chargé, président de la Coopération agricole qui représente 2 300 coopératives, déclarait fin août à l’AFP rester «  aujourd’hui avec des niveaux de coûts de production importants ».

L’Ilec, qui représente les plus gros industriels – souvent des multinationales comme Coca-Cola, L’Oréal ou Danone – estime que «  moins d’une entreprise sur cinq » parmi ses membres est «  concernée par des baisses de coûts » de matières premières agricoles ou industrielles depuis mars. En outre, un tiers des entreprises a, selon l’organisation, «  subi de nouvelles hausses » pas encore répercutées.

> Et si l’inflation se tasse ?

L’inflation alimentaire semble décélérer. Les prix devraient donc moins augmenter dans les mois à venir… mais continuer néanmoins à grimper.

Industriels comme supermarchés estiment très improbable un retour aux prix de 2019. Les autres postes de dépenses importants, logement (loyer ou crédit) ou transports (carburant, prix des véhicules), ont eux aussi grimpé sensiblement, obérant d’autant le pouvoir d’achat des ménages.

Celui-ci a toutefois progressé significativement – en moyenne – ces dernières années.

Mais le ressenti est différent : «  Même lorsque le pouvoir d’achat augmente, vous pouvez avoir la moitié des Français qui vont penser qu’il a baissé », expliquait fin mai à l’AFP le directeur de l’Observatoire Cetelem de la banque française BNP Paribas, Flavien Neuvy. C’est selon lui lié à la hausse constante de la part de dépenses contraintes dans les budgets.

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