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Devy Erlih, violoniste et pédagogue

Né à Paris, en 1928, le musicien, compositeur et chef d'orchestre, formé au Conservatoire de Paris, a été professeur à Marseille, puis dans la capitale.

Par Pierre Gervasoni

Publié le 09 février 2012 à 14h23, modifié le 12 février 2012 à 19h53

Temps de Lecture 3 min.

Le violoniste Devy Erlih est mort à l'âge de 83 ans, mardi 7 février, dans le 10e arrondissement de Paris. Il a été renversé par un camion alors qu'il se rendait à l'Ecole normale de musique pour y donner des cours. C'est dans cette institution, salle Cortot, qu'il sera apparu pour la dernière fois en public, il y a une dizaine de jours, à l'occasion d'un hommage au compositeur Narcisse Bonet, dont il avait interprété une oeuvre.

Figure de référence dans l'interprétation de la musique d'André Jolivet (1905-1974), dont il fut le seul à avoir exécuté toutes les oeuvres pour violon, Devy Erlih assura la création de plusieurs concertos (Milhaud, Tomasi, Sauguet) avec une ouverture d'esprit qui fit aussi de lui un pédagogue recherché (au Conservatoire de Paris, entre 1982 et 1995). D'un naturel passionné mais humble, ce musicien polyvalent avait été convié à présider le jury de l'édition 2010 du Concours Long-Thibaud dont il avait remporté le premier Grand Prix en 1955.

Né le 5 novembre 1928 à Paris, Devy Erlih apprend le violon avec son père avant d'intégrer, à l'automne 1941, la classe de Jules Boucherit au Conservatoire de Paris. Quelques semaines après son admission, un chroniqueur de L'Information musicale fait son éloge dans le 11e Caprice de Paganini et le Finale du Concerto de Vieuxtemps. L'adolescent a "une surprenante autorité. Sa manière est brillante, vigoureuse." En un mot, "c'est une nature", certifie le critique à propos de "Mr Erlhé" (sic) dont il convient de retenir le nom, même mal orthographié...

Voir son patronyme déformé deviendra le dernier des soucis de Devy Erlih à la fin de l'année scolaire. L'application des lois antisémites instituées par le régime de Vichy lui vaut d'être radié du Conservatoire alors qu'il a décroché un premier accessit avec mention ascendante au concours de juin 1942 et qu'il est donc bien lancé pour l'obtention du Prix. Oubliés, les rêves de consécration. L'heure est à la survie. Le jeune violoniste se cache d'abord chez un libraire puis, quelques jours avant une rafle de la Gestapo, trouve refuge dans une habitation désaffectée près de Fontainebleau.

La maison appartient à la pianiste Magda Tagliaferro, proche de Jules Boucherit. Devy Erlih doit donc à son maître d'avoir atteint sans encombre la fin de la guerre. Le Conservatoire lui ouvre de nouveau ses portes tout en l'obligeant à repasser le concours d'entrée ! Cette abusive formalité accomplie, le vaillant violoniste remporte le 1er Prix à l'unanimité en juin 1945. Commence une période d'intense activité auprès des compositeurs. Devy Erlih, qui n'a pas froid aux yeux, frappe à la porte de célébrités (Poulenc, entre autres) et tente d'obtenir des oeuvres originales pour son instrument. Sa démarche n'a rien de carriériste, comme en témoigne une lettre adressée à Henri Dutilleux, en 1951, au lendemain de la découverte de sa Première symphonie à la Radio. "Quand écrirez-vous ce concerto de violon que seul vous pouvez faire et que j'attends avec tant d'impatience ?", écrit alors ce quasi-inconnu avec une foi prophétique. Dutilleux le livrera en 1985 et Isaac Stern en sera le soliste. Mais, en 1989, c'est bien Devy Erlih qui le défendra au Japon puis en France.

Voué au répertoire contemporain autant qu'au classique (qu'il a pratiqué dans sa jeunesse en compagnie de Georges Enesco), Devy Erlih diffuse abondamment la musique d'André Jolivet (Suite rhapsodique, Incantation, Concerto), dont il épousera la fille Christine en 1977. Moins connues que ses activités d'interprète (bien servies par le disque) et d'enseignant (inaugurées à Marseille en 1968), les compositions de Devy Erlih comptent quelques perles dans des domaines aussi rares que l'était sa personnalité. A l'instar d'un ballet, La Robe de plumes, commandé par l'actrice Rita Hayworth en 1965.

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