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Michel Legrand, «fontaine à musique»

Le compositeur célèbre ses 80 ans avec une anthologie et deux concerts au Théâtre du Chatelet, à Paris.

«Nul n'est prophète en son pays.» Michel Legrand a dû plus d'une fois méditer ce dicton. Alors qu'il était célébré dans le monde entier comme un immense musicien, le compositeur, pianiste, chanteur, chef d'orchestre et arrangeur a souvent eu maille à partir avec la reconnaissance française. Il aura fallu qu'il s'exile une quinzaine d'années aux États-Unis, d'où il reviendra les bras chargés de récompenses, afin qu'on le considère comme un des plus brillants mélodistes de son temps. Où, comme le surnommait son complice Jacques Demy, «une fontaine à musique». Une anthologie de quatre CD vient aujourd'hui rappeler l'étendue de son inspiration. Chanson, jazz et musique de film y sont représentés équitablement, donnant un bel aperçu de son éclectisme. Avec, en prime, un volume gravé avec son épouse, Catherine Michel, dans un duo inédit harpe et piano.

C'est aux côtés de la soprano Natalie Dessay qu'il remonte mardi sur scène. Admirative depuis qu'elle a découvert le film Peau d'Âne,dont il a signé la bande originale, la chanteuse interprétera quelques-uns des plus grands airs du maître. La veille, lundi soir, il aura dirigé l'orchestre symphonique dans une relecture de ses plus beaux thèmes pour le cinéma.

Parmi sa pléthore d'activités, la musique de film demeure la discipline à laquelle Michel Legrand est le plus spontanément associé.

Bourreau de travail

Avec deux cents partitions à son palmarès, il aura été un des musiciens les plus actifs du genre, prêtant sa science harmonique à des réalisateurs comme Marcel Carné, Orson Welles, Robert Altman, Louis Malle et bien d'autres. En 1964, son travail sur Les Parapluies de Cherbourg lui ouvrit les portes de Hollywood. Il y passa une quinzaine d'années, de L'Affaire Thomas Crown et son thème, Les Moulins de mon cœur, une de ses plus grandes réussites, à Jamais plus jamais, qui marquait le retour de Sean Connery dans le rôle de l'agent secret 007. «Je trouvais marrant d'avoir un James Bond dans mon escarcelle», nous confiait-il en 2009. Formé par Nadia Boulanger aux côtés d'autres élèves prestigieux comme Quincy Jones, Legrand a accompagné plusieurs révolutions musicales. Celle du jazz d'abord, collaborant avec des maîtres de la trempe de Bill Evans, Miles Davis, Sarah Vaughan ou Ella Fitzgerald. Celle du rock'n'roll ensuite. Accompagnant Maurice Chevalier à New York en 1956, il rapporte des disques d'Elvis Presley à ses amis Henri Salvador et Boris Vian, qui s'attelèrent avec lui à une adaptation parodique du genre sous le titre Rock And Roll Mops.

La carrière de Legrand chanteur, amorcée sous l'impulsion de Brel, reste la plus décriée de ses expérimentations. Mais ses collaborations avec de grands interprètes comme Nana Mouskouri, Claude Nougaro ou Jean Guidoni sont résolument placées sous le signe de la réussite.

À bientôt 80 ans, Legrand n'est pas homme à se reposer sur ses lauriers. Ce bourreau de travail a complété l'an passé deux projets qui lui tenaient à cœur. L'écriture de sa première musique de ballet, pour Liliom de John Neumeier à l'Opéra de Hambourg, mais aussi les arrangements d'un ambitieux album de Noël réunissant plusieurs interprètes contemporains (Ayo, Madeleine Peyroux, Jamie Cullum). Éclectique un jour, éclectique toujours…

Au Théâtre du Châtelet (Paris, Ier):«Le Cinéma de Michel Legrand»
(avec orchestre symphonique) le 23 janvier ; «Natalie Dessay chante Michel Legrand» (avec Catherine Michel) le 24. «La Musique au pluriel», coffret
4 CD (Universal Music).

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