Touchez pas au grisbi

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Touchez pas au grisbi

Réalisation Jacques Becker
Scénario Jacques Becker
Maurice Griffe
Albert Simonin
Acteurs principaux
Sociétés de production Del Duca Films
Antares Film Produzione Cinematografica
Pays de production Drapeau de la France France
Drapeau de l'Italie Italie
Genre Drame, film de gangsters
Durée 94 minutes
Sortie 1954

Série Max le Menteur

Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution.

Touchez pas au grisbi est un film français de Jacques Becker, sorti sur les écrans à Paris en mars 1954.

Il s'agit d'une adaptation de Touchez pas au grisbi ! (1953), roman du même nom d'Albert Simonin, premier volet de la trilogie de Max le Menteur, et dont les volumes suivants, également adaptés à l'écran, sont Le cave se rebiffe (adapté sous le même titre en 1961) et Grisbi or not grisbi (adapté sous le titre Les Tontons flingueurs en 1963).

Touchez pas au grisbi a été présenté en compétition à la Mostra de Venise de 1954. Il connut le succès à sa sortie en salle. Il marqua par ailleurs les débuts de Lino Ventura à l'écran et relança la carrière de Jean Gabin, définitivement débarrassé de son image de « gueule d'amour » qui datait d'avant-guerre.

Synopsis[modifier | modifier le code]

Max (Jean Gabin) et Henri Ducros dit Riton (René Dary) sont deux truands associés depuis vingt ans. Ils viennent de réaliser un « coup fumant » en volant 50 millions en barres d'or. Riton parle un jour du magot à sa petite amie, Josy (Jeanne Moreau), qui en parle à Angelo Fraiser (Lino Ventura), un bandit rival. Après une tentative ratée d’enlèvement de Max pour lui faire dire où est caché l'or, Angelo enlève Riton et propose de le libérer en échange du trésor. Max récupère alors le butin qu’il avait confié à Oscar, son oncle receleur.

Avec l'aide de Pierrot (Paul Frankeur) et de Marco (Michel Jourdan), Max part procéder à l'échange de nuit sur une route, comptant bien récupérer et son ami et son or. Tout se passe d'abord comme prévu : Riton rejoint ses compères et Angelo et ses sbires emportent l'or. Mais c'est alors qu'arrivent trois autres complices d'Angelo qui lancent des grenades sur la voiture de Max et ses acolytes. Max, Riton et Pierrot parviennent à se cacher derrière un talus mais Marco, qui s'était réfugié derrière la voiture, est tué par l'explosion. Max abat alors les trois assaillants avec son pistolet-mitrailleur.

Cependant, Angelo et ses subordonnés qui attendent dans une voiture pour voir si leur combine a marché sont alors pris sous les tirs de Max, Pierrot et Riton. Ce dernier est blessé d'une balle durant la course-poursuite. De son côté, Angelo perd ses complices et sa voiture, touchée par les balles, a un accident. Il sort alors de la voiture, une grenade dégoupillée dans la main, mais il est abattu par Pierrot. La grenade tombe et explose, brûlant la voiture dans laquelle se trouvent les barres d'or. Par la suite, alors qu'il doit déjeuner au restaurant avec Betty, l'une de ses maîtresses, Max apprend que Riton est mort des suites de ses blessures.

Fiche technique[modifier | modifier le code]

Distribution[modifier | modifier le code]

Production[modifier | modifier le code]

Développement et choix des interprètes[modifier | modifier le code]

Jean Gabin.

En 1953, le réalisateur Jacques Becker lit le roman Touchez pas au grisbi d'Albert Simonin, gros succès de la collection Série noire[3]. Becker pense qu'il s'agit d'un sujet susceptible d'intéresser le public[3]. Impressionné par le film Le Salaire de la peur de son ami Henri-Georges Clouzot (Palme d'or au Festival de Cannes), Becker se dit être capable de retrouver les faveurs des spectateurs et, par voie de conséquence, la confiance des producteurs qui s'est émoussée depuis l'échec commercial de ses deux derniers films[3], Casque d'Or et Rue de l'Estrapade.

Becker prend contact avec Simonin pour lui proposer d'écrire une adaptation du roman avec lui et son co-scénariste habituel, Maurice Griffe[3]. L'écrivain accepte et encourage même le cinéaste à s'éloigner du texte original :

« Pendant le travail d'adaptation, c'est lui qui tenait le moins à respecter son bouquin[4]. »

— Jacques Becker, février 1954.

Lino Ventura.

Le réalisateur enlève donc du scénario les répliques argotiques du livre et choisit d'approfondir l'étude de caractère des deux personnages masculins principaux, Max et Riton, au détriment de l'action, privilégiée dans ce genre de film[3]. Becker utilise en effet l'argument prétexte d'un affrontement entre deux bandes rivales, celle de Max et celle d'Angelo, pour traiter surtout d'une amitié entre deux truands vieillissants brisée par la trahison d'un tiers[3].

Pour le choix des deux rôles principaux, Becker pense à Daniel Gélin, avec lequel il avait déjà travaillé, mais ce dernier refuse[3]. Le réalisateur envisage alors François Périer, mais comprend qu'il faut un acteur un peu plus âgé pour incarner Max, tel qu'il est conçu dans le scénario[3]. On lui conseille alors Jean Gabin, alors sous contrat avec la société de production de Touchez pas au grisbi, Del Luca Productions[3]. Bien qu'appréciant l'acteur depuis Les Bas-fonds et La Grande Illusion, Becker se montre réticent car il incarne pour lui une forme révolue du cinéma français : Gabin peine à retrouver les faveurs du public d'avant-guerre depuis son retour des États-Unis[3]. Le réalisateur-scénariste fait tout de même lire le scénario à l'acteur, qui accepte le rôle[3]. Becker va en effet tirer avantage de l'image vieillissante de l'acteur[5].

Alors que Becker cherche un acteur pour interpréter Riton, Gabin lui présente René Dary, qui a connu son heure de gloire sous l'Occupation en tenant des rôles que Gabin, alors parti dans son exil américain, aurait pu tenir[5]. C'est aussi grâce à Gabin que Gaby Basset, alors ex-femme de l'acteur, est engagée pour jouer l'épouse de Paul Frankeur[5], également proche de Gabin. Jeanne Moreau et Dora Doll sont engagées pour jouer respectivement les jeunes maîtresses de Riton et Max[5]. Pour incarner le rôle d'Angelo, rival de Max, Becker cherche une « gueule » inconnue et jette son dévolu sur un ancien champion de lutte, Lino Ventura[6]. Alors qu'il ne joue qu'un second rôle, pour sa toute première apparition à l'écran, il demande par pure provocation un cachet d'un million d'anciens francs (cachet presque équivalent à celui de Jean Gabin), proposition qui est acceptée à sa grande surprise[7].

Tournage[modifier | modifier le code]

Vue de la rue Victor Massé (9e arrondissement de Paris), où fut tourné la scène de la boîte où se rend Jean Gabin au début du film.

Le tournage du film débute dans les studios de Billancourt, à l'exception d'extérieurs en région parisienne et niçoise à l'automne 1953[5] (du au [8]). Le tournage se déroule avec une équipe technique que le réalisateur connaît bien : Jean d’Eaubonne au décor, Pierre Montazel à l’image, Colette Crochot pour le script et toujours Marguerite Renoir au montage. Marc Maurette, ancien assistant de Becker sur ses trois premiers films, est de retour, aidé par Jean Becker, fils aîné du cinéaste qui fait ses premières armes. La célèbre musique à l’harmonica et au piano est de Jean Wiener[5].

Sortie et accueil[modifier | modifier le code]

Touchez pas au grisbi sort dans les salles françaises le avec une interdiction aux moins de 16 ans[6]. L'accueil critique est enthousiaste[3] et le film rencontre un véritable succès auprès du public, puisqu'il réunit 3 190 621 entrées l'année de sa sortie[9]. Finalement, le film a réuni 4 713 585 entrées[10]. Le film est notable pour avoir relancé la carrière de Jean Gabin sur la durée en tant que vedette : après la Seconde Guerre mondiale et son retour en France, l'acteur avait connu une période moins propice au succès que pendant l'entre-deux-guerres[11], malgré les bons scores au box-office de Au-delà des grilles, La Marie du port, La nuit est mon royaume et La Minute de vérité[12]. C'est par ailleurs la toute première apparition au cinéma de Lino Ventura. Le champion d'Europe de catch 1950, engagé « par hasard » par Jacques Becker à l'âge de 34 ans, crève littéralement l'écran[13]. Sa carrière est lancée[13].

À l'international, le film est vu par plus de 2 millions de spectateurs en Italie[14] et par 21 700 spectateurs pour sa ressortie aux États-Unis en 2003[15].

Récompenses et distinctions[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. « TOUCHEZ PAS AU GRISBI : Box-office », sur CBO Box-Office (consulté le )
  2. « TOUCHEZ PAS AU GRISBI : Visa et Classification », sur CNC, (consulté le ).
  3. a b c d e f g h i j k et l http://moulinduroc.asso.fr/wp-content/uploads/2017/06/becker_DP.pdf
  4. Cahiers du cinéma, février 1954
  5. a b c d e et f « TOUCHEZ PAS AU GRISBI – Jacques Becker (1954) », sur mon cinéma à moi, (consulté le ).
  6. a et b « TOUCHEZ PAS AU GRISBI - JEAN GABIN ET LINO VENTURA BOX OFFICE 1954 », sur BOX OFFICE STORY (consulté le ).
  7. Signé : Lino Ventura, op. cité, p.23.
  8. « Touchez pas au grisbi - Fiche Film », sur bifi.fr (consulté le ).
  9. Box office français 1954 (consulté le 20 mai 2019).
  10. « Touchez pas au grisbi », sur Jp's Box-Office (consulté le ).
  11. « encinematheque.fr/acteurs/H24/… »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?).
  12. « Box Office Jean Gabin », sur Box Office Story (consulté le ).
  13. a et b Florence Monteil, « Lino Ventura, de l’autre côté de l’écran », sur notretemps.com, Notre temps, (consulté le )
  14. « TOUCHEZ PAS AU GRISBI - JEAN GABIN BOX OFFICE 1954 », sur BOX OFFICE STORY (consulté le ).
  15. (en) « Touchez pas au grisbi (Re-issue) (2003) », sur Box Office Mojo, IMDb (consulté le ).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Touchez pas au grisbi, (du livre au film) in André Nolat : Roman Ciné, Paris, Publibook-Le Petit futé, (ISBN 978-2-342-00301-7)

Liens externes[modifier | modifier le code]

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