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Quand Puccini mange du Lyon

David Pountney signe unGianni Schicchi très spirituel et rythmé.

L'Opéra de Lyon propose un excellent «Triptyque» accompagnés d'autres œuvres en un acte du début du XXe siècle.

Où peut-on voir six opéras en trois jours dans des réalisations de premier ordre? À Lyon. On est habitué à ce mini-festival annuel au cours duquel Serge Dorny place ses équipes artistiques et techniques face à un défi qui permet de les souder. À ce pari s'ajoute celui de l'intelligence de la programmation. Le Triptyque de Puccini n'est plus une rareté depuis que Nicolas Joel nous a fait la joie de le faire entrer au répertoire de l'Opéra de Paris.

Mais, outre le fait qu'à Lyon la mise en scène de David Pountney nous paraît autrement vivante que la lourde machine de Luca Ronconi à Bastille, le couplage est aussi aventureux qu'instructif. À chaque volet du Trittico puccinien est associé un opéra en un acte de l'aire germanique, relevant de thèmes voisins. Si l'on connaît maintenant assez bien la Tragédie florentine de Zemlinsky, qui peut se targuer d'avoir déjà assisté à une représentation de Sancta Susanna de Hindemith ou de D'Aujourd'hui à demain de Schönberg?

Un beau sens du style

En plus de l'intérêt de resituer Puccini dans son contexte, celui de la modernité du XXe siècle (et non du mélo sirupeux), c'est une occasion de découvrir des ouvrages rares qui font plus que tenir la route: le public de l'Opéra de Lyon s'est montré réceptif à la comédie dodécaphonique (!) de Schönberg, savoureuse satire de l'avant-garde, aussi bien qu'aux provocations sulfureuses de Hindemith, qui montre tout de même une religieuse faisant l'amour avec le Christ. Au fait, pas de manifestations intégristes sur le parvis de l'Opéra Nouvel: le climat serait-il plus apaisé à Lyon qu'à Paris?

Si David Pountney réussit mieux un Gianni Schicchi très spirituel et rythmé que Sœur Angélique, où il manque d'imagination, on retiendra surtout les mises en scène de John Fulljames, qui s'adapte à l'univers lascif de Hindemith aussi bien qu'à l'humour de Schönberg avec une grande souplesse. Réactivité encore lorsque le chef tombe malade trois semaines avant la première.

Devant l'impossibilité de trouver un maestro qui maîtrise six ouvrages aussi rares, on scinde la direction: au vieux routier Bernhard Kontarsky, les trois allemands, où il obtient de l'Orchestre de l'Opéra de Lyon une précision et une intensité maximales; au jeune Gaetano d'Espinola, les trois italiens, qu'il dirige pour la première fois, avec encore quelque raideur, mais déjà un beau sens du style. Côté chant, les voix pucciniennes laissent sur sa faim (mais attention au ténor Thiago Arancam!), les chanteurs germaniques convainquent davantage, à commencer par l'extraordinaire baryton Martin Winkler. L'Opéra de Lyon a su se créer une identité.

Opéra de Lyon, jusqu'au 13 février. www.opera-lyon.com

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