Un hautbois bucolique émet quelques notes avant de s'effacer au profit de sa voisine, la flûte, qui passe bientôt le relais au violon solo, lequel transmet dans la foulée son bien mélodique à la clarinette qui, elle, l'enjolive avant de le retourner à l'envoyeur... Les petits ruisseaux font un grand fleuve, samedi 18 février, Salle Pleyel, à Paris. La voie de navigation musicale ainsi amorcée est l'oeuvre d'un compositeur jeune (37 ans) mais déjà incontournable : Bruno Mantovani. Jeux d'eau,donnée en création par Renaud Capuçon et l'orchestre de l'Opéra national de Paris, prend la forme d'un concerto pour violon dont on ne perd pas une goutte pendant vingt-cinq minutes. Le principe de l'aller-retour qui se manifeste au début laisse à penser que la partie soliste prend forme au contact de l'environnement, comme la rivière creuse son lit.
Mais avec Mantovani il n'est jamais question de lambiner ! Au bout de quelques minutes le périple aquatique arbore déjà la puissance et l'indépendance d'un cheminement millénaire. Pour en apprécier la richesse, il faut alors s'immerger dans son flot tumultueux. Et l'auditeur-plongeur de partir à la découverte d'espèces non répertoriées (grondements insolites de contrebasses) et de s'extasier devant le ballet d'un hippocampe virtuose (Renaud Capuçon, Paganini des fonds marins). Sous la direction très suggestive de Philippe Jordan, impérial, l'orchestre enchante par ses qualités ondulatoires et par ses jaillissements spectaculaires. Pour déchaîner puis dompter de tels éléments, il fallait un compositeur à la stature de géant. Cette dimension, maintes fois reconnue à Mantovani, était de circonstance ce soir-là puisqu'allait suivre une époustouflante interprétation de la Première Symphonie, de Gustav Mahler, sous-titrée "Titan".
Sur le Web : www.brunomantovani.com.
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