Dans les coulisses de l'autre Goncourt

Les jeunes jurés du Goncourt des lycéens ont débattu avec passion avant de sacrer Carole Martinez. À une voix près.

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Le jury a récompensé Carole Martinez, lundi 7 novembre, du Goncourt des lycéens.
Le jury a récompensé Carole Martinez, lundi 7 novembre, du Goncourt des lycéens. © Montage LePoint.fr

Temps de lecture : 3 min


Deux heures et demie d'un conciliabule "féroce" à huis clos. Des débats animés opposant "deux visions de la littérature". Un scrutin serré qui s'est joué au troisième tour d'une seule petite voix. Réunis en conclave lundi 7 novembre à Rennes, les treize jurés nationaux du Goncourt des lycéens ont pris leur rôle à coeur, contredisant ces esprits chagrins qui déplorent que la jeunesse ne se passionne plus pour les livres. C'est au final Carole Martinez, auteur de l'ensorcelant Du domaine des murmures (Gallimard), qui décroche ce prix pas comme les autres, organisé par la Fnac et auquel s'associe une nouvelle fois Le Point. Pour la finaliste malheureuse du Goncourt "adulte", voilà bien plus qu'un lot de consolation, sachant que le Goncourt des lycéens s'avère d'année en année de plus en plus prescripteur du côté des librairies (Mathias Énard, lauréat 2010, a vendu 170 000 exemplaires de son Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants).

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La lauréate Carole Martinez - Mathilde Girault - SipaLors de l'annonce du résultat, le jury - représentant une cinquantaine d'établissements de France et de l'étranger - a salué "l'écriture poétique" de Carole Martinez. Que les discussions furent pourtant acharnées ! Lors des délibérations, deux camps se sont ainsi vite dessinés, l'un - féminin - soutenant le conte médiéval Du domaine des murmures, l'autre - plutôt masculin - défendant Retour à Killybegs (Grasset) de Sorj Chalandon. Ce sont les filles qui ont visiblement eu les arguments les plus convaincants. Heureuse du résultat, Léa, en première au lycée Rodin de Paris, évoque "le magnifique portrait d'une femme se faisant emmurer, mais qui obtient un pouvoir incroyable sur les hommes". Léo, en première L à Nantes, est, lui, un fervent pro-Chalandon. "Je suis dégoûté, car, comme la finale de Coupe du monde de rugby, ça se joue à un point près."

Inattendu

Présent à Rennes, Patrick Rambaud, membre de l'Académie Goncourt, observe ces joutes juvéniles d'un air amusé. "Chaque année, les lycéens nous surprennent en choisissant un livre inattendu au sujet très particulier. L'année dernière, c'était Michel-Ange à Istanbul avec Mathias Énard. Là, c'est le Moyen Âge et l'enfermement. Je ne sais pas comment ça peut les intéresser." L'académicien se montre même envieux de l'innocence et de la liberté de ses jeunes collègues. "Eux ne se verront pas reprocher le fait d'avoir choisi un livre de chez Gallimard, qui fête son centenaire, contrairement à nous qui sommes sans cesse suspectés."

S'entretenant avec les lycéens à la fin des délibérations, Patrick Rambaud les a amusés avec ses anecdotes. À une jurée qui lui demande pourquoi le Goncourt avait, l'année dernière, couronné Michel Houellebecq, l'écrivain explique ainsi : "Il fallait qu'il l'ait un jour ou l'autre, pour qu'il nous foute la paix !" En attendant de peut-être un jour rejoindre le petit monde littéraire, tous les lycéens ont salué cette expérience unique qui les a vus dévorer quinze romans en deux mois pour les plus gourmands d'entre eux. "Généralement, en classe, les livres qu'on étudie se ressemblent tous. Là, c'était génial de découvrir des écritures totalement différentes", assure Léa. À l'heure de reprendre le train, son camarade Léo résume bien le sentiment général : "Ça va être naze de retourner dans la routine !"

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Commentaires (2)

  • Nico17!

    Nos jeunes lycéens ont la fouge de leur jeunesse mais malgré quelques "écarts" de langage, je suis ravie de voir qu'il y a encore des jeunes qui s'intéressent à la lecture et ne se contentent pas d'un écran de télévision avec des émissions débiles. Alors sachons leur pardonner le vocabulaire...

  • Horace Plimsoll

    "Génial", "naze"... Nos petits jurés lycéens n'ont visiblement pas assez lu, autrement ils utiliseraient sans doute (en tout cas c'est ce que l'on espère) un vocabulaire un peu plus complexe pour définir leurs états d'âme. Si les débats étaient de cet acabit, ça devait être croquignolet à en faire saigner les oreilles.