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Culture - Festivals - Baalbeck

Une soirée musicale « classy » avec Jessye Norman

À la lueur de grands chandeliers, Jessye Norman, cheveux à la Angela Davis retenus par un bandeau doré au front, la voix toujours impressionnante, a parlé ce soir-là de l’Amérique profonde, des tourmentes du cœur et des remous de l’amour. En termes non pas belcantistes, mais de chansons musicales américaines très « classy ».

Le temple de Bacchus a vibré aux pulsations des étoiles avec cette voix aux vibratos intenses et veloutés.

En robe noire longue à la ceinture de soie recouverte d’une ample « abaya », houppelande noire aux larges motifs fleuris blancs, l’impavide cantatrice, joyau de la constellation des divas noires, a vite donné le ton.


On oublie l’art lyrique, on oublie Aida, Cassandre, Leonore, Sélika et Ariane en lionnes rugissantes et on se retrouve sous le charme d’une Jessye Norman aux inflexions et modulations toujours surprenantes, voluptueuses et captivantes pour une tournée des grands airs du « music hall » américain à l’âge d’or.


Si la première chanson de Falling in love des rois du Broadway Entertainment System, Rodgers et Hammerstein, donnait quelque crainte sur une voix qui a enflammé l’art lyrique et avait atteint au Festival d’Aix dans les années 1980 le sommet de la perfection, la suite a vite fait de tranquilliser et séduire l’auditoire par une prestation royale. Royale de talent, de charisme et de présence vocale et scénique. Une remarquable prestation doublée des dons d’une musicienne qui sait présenter et faire vivre une œuvre.


Port majestueux (pourtant la diva, notablement amaigrie à 67 ans, n’a plus la stature d’antan), voix impressionnante (avec ces graves sidérants qui surgissent brusquement sans crier gare), timbre chaud et limpide comme du cristal, Jessye Norman a offert une croisière de luxe dans les paysages du Nouveau Continent ainsi que sur les chemins tortueux de sa carte du tendre.


On retient des moments d’anthologie et d’émotions frémissantes avec The song is you de Jerome Kern mais surtout the Man I love et My man’s gone now de Gershwin, ainsi que ce bouleversant Solitude de Kennedy/Ellington et ce grave In the still of the night de Cole Porter.


Décapité de son chapiteau, le temple de Bacchus a vibré aux pulsations des étoiles avec cette voix aux vibratos intenses et veloutés. Tout en subissant le mélange d’aberrations d’un environnement qui ne savoure pas de toute évidence l’art car, aux pianissimos de la diva répondait le fortissimo des feux d’artifice toujours intempestifs dans ces chaudes nuits de la Békaa...


Pour terminer, l’incontournable et très attendu Summer time de «Porgy and Bess» de Gershwin. Assise sur une chaise, les pans de sa abaya ramenés sur les genoux, les paupières closes, les traits graves, admirablement accompagnée au clavier par Mark Markham, de sa sublime voix de negro spiritual, Jessye Norman a chanté la plus immortelle des berceuses de la Caroline du Sud. Une berceuse aux confins du chant de la mort et de la vie, de la richesse et de la misère, de l’adversité et du combat. Un chant noir et lumineux, chargé de tous les espoirs...


Un moment grandiose hors du temps où la diva a donné toute l’ampleur et l’amplitude d’un talent parfaitement maîtrisé. Un talent qui électrise et galvanise l’auditoire.


Salves d’applaudissement et gerbes de roses blanches pour ce rappel, véritable supplément d’âme pour un concert qui rend, en toute intensité, hommage aux grands maîtres de la musique américaine contemporaine.

En robe noire longue à la ceinture de soie recouverte d’une ample « abaya », houppelande noire aux larges motifs fleuris blancs, l’impavide cantatrice, joyau de la constellation des divas noires, a vite donné le ton.
On oublie l’art lyrique, on oublie Aida, Cassandre, Leonore, Sélika et Ariane en lionnes rugissantes et on se retrouve sous le charme d’une Jessye Norman aux...

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