Le diesel est cancérogène, c'est officiel. Et il se passe quoi maintenant ?

Les moteurs diesel ont été reconnus comme «cancérogènes certains» par l'Organisation mondiale de la Santé. L'information n'est pas nouvelle mais pourrait influer sur les comportements futurs de l'Etat et des constructeurs.
par Marièke Poulat
publié le 14 juin 2012 à 18h36

« La dangerosité du diesel est enfin reconnue. Cela permettra une prise en compte collective, entre les constructeurs automobile, l'Etat et les collectivités territoriales », déclare Patrice Halimi, secrétaire général de l'Association santé environnement en France (Asef), après la décision de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) de faire du diesel un « cancérogène certain pour l'humain».

Benoît Hartmann, porte-parole de France nature environnement (FNE), renchérit : «C'est une bonne nouvelle ! Cette reconnaissance légitime notre combat». Enthousiaste, ce dernier laisse miroiter la possibilité d'organiser des recours devant la justice : «Désormais, les malades pourront se tourner vers la justice et mener des actions. En établissant une causalité entre cancer et diesel, l'OMS crée une possibilité de contentieux qui pourrait inquiéter les constructeurs et les faire changer.»

Les malades peuvent se tourner vers la justice

Porter plainte contre l'Etat et les constructeurs automobiles pour surexposition au diesel relève cependant du futur. Lointain. Arnaud de Broca, secrétaire général de l'Association des accidentés de la vie (Fnath), modère : «Ce rapport ouvre une brêche et nous nous servirons certainement de ces résultats dans certains dossiers. Je ne vais pas vous dire que dès demain, nous allons nous présenter devant les tribunaux avec des dossiers de malades plein les bras : on n'en est pas encore à la traduction juridique de cette déclaration.»

Selon lui, il pourrait par exemple falloir « 10 ans pour inscrire le diesel au tableau des causes des maladies professionnelles », ce tableau qui permet de faire prendre ces maladies en charge par la sécurité sociale. Le temps de faire une demande, de l'inscrire à l'ordre du jour, de la discuter entre scientifiques et de la négocier.

« C'est avant tout une volonté politique », glisse Arnaud Broca. La question du diesel et de son utilisation est transversale et incombe aujourd'hui au ministère de l'environnement en amont et à celui de la santé en aval. Le premier assure qu'aucune mesure n'a encore été prise suite à l'annonce de l'OMS - « très récente » : « des projets étaient déjà sur la table ».

« Le problème des micro-particules est connu depuis le charbon », remarque Patrice Halimi. Dès 1988, l'OMS avait souligné le caractère dangereux du diesel mais manquait d'éléments pour déterminer le lien entre micro-particules et cancer du poumon.

Un danger connu de longue date

« Pour déterminer la cancérogénéité d'un élément, nous nous réunissons pour étudier les études publiées sur celui-ci» décrit Nicolas Gaudin, responsable de la communication de l'Agence internationale de recherche contre le cancer (IARC). C'est l'agence de l'OMS qui vient d'établir la cancérogénéité du diesel. « Dans le cadre du diesel et des micro-particules, nous attendions les résultats d'une étude américaine menée par le National cancer institute sur des mineurs particulièrement exposés. Ils sont arrivés en mars. »

Cette étude, menée sur 12 315 mineurs de fond dans huit mines différentes, statue que « les risques de contracter un cancer du poumon pour les mineurs les plus exposés sont trois fois plus important que pour ceux peu exposés » aux rejets de diesel. Début juin, un collège de scientifiques se réunit à l'IARC, pendant huit jours, pour déterminer le caractère « cancérigène certain » des émanations issues des moteurs diesel.

Selon la classification de l'OMS, cela signifie qu'une « relation de causalité a été observée entre l'exposition et le développement du cancer dans des études où le hasard, les biais et les erreurs peuvent être écartées ». De plus, l'organe touché doit être clairement identifié. Si le diesel a clairement été établi comme une cause du cancer du poumon, il n'est qu'un « cancérogène probable » pour la vessie.

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