A peine nommé, le nouveau ministre de la défense français est attendu au sommet de l'OTAN, qui se tient à Lisbonne pour deux jours, à partir de vendredi. Une coïncidence cocasse, quand on sait qu'Alain Juppé avait critiqué le retour de la France au sein du commandement de l'alliance atlantique.
Le maire de Bordeaux, quand il avait pris du recul vis-à-vis de Nicolas Sarkozy, s'était montré peu avenant à l'égard de la politique de défense du chef de l'Etat. En février 2009, dans une tribune au Monde, il se demandait : "La France a-t-elle intérêt à réintégrer en 2009 le commandement militaire de l’OTAN qu’elle a quittée en 1966 ? La question n’est pas sacrilège. Nul ne sait comment le général de Gaulle y répondrait aujourd’hui."
Annoncée disparue par Le Canard enchaîné de mercredi, la note qui reproduit ce texte est toujours consultable sur le blog de l'ancien premier ministre. Le bien-fondé du rapprochement de la France et de l'OTAN, dominée par les Américains, a été mis en cause plusieurs fois, sur divers tons, par Alain Juppé : "Je me demande si on n’est pas en train de faire un marché de dupes en rentrant sans conditions", avait-il lancé en juin 2008 lors d'une conférence. Peu après cette sortie, il avait toutefois estimé sur son blog que Nicolas Sarkozy avait répondu de façon convaincante à ses inquiétudes.
Pourtant, deux ans plus tard, en mai, Alain Juppé fait de nouveau part de ses doutes : "Je ne suis pas sûr qu'on ait gagné à perdre notre position originale", estime-t-il, dans un entretien à la revue Défense cité par le Nouvel Observateur. Malgré les promesses de Nicolas Sarkozy, "il n'y a pas eu d'avancement sur le plan de l'Europe de la défense", ajoute-t-il.
ASSUMER DES CHOIX QU'IL NE PARTAGE PAS PLEINEMENT
Au sommet de l'OTAN, à Lisbonne, Alain Juppé pourrait avoir à assumer d'autres choix qu'il ne partageait pas pleinement. Le ministre, accompagné du président, aura l'occasion de rappeler la position de Paris, selon laquelle la dissuasion nucléaire reste incontournable. Or, Alain Juppé s'est distingué en signant en octobre 2009 une tribune (cosignée avec notamment Michel Rocard et parue dans Le Monde) appelant à "un désarmement nucléaire mondial".
Au menu du sommet de l'OTAN, Alain Juppé trouvera enfin l'Afghanistan. L'enjeu : le retrait progressif des troupes, dont celles de l'armée française. "L'Afghanistan est un piège pour tous les contingents qui y sont. Je crois que la ligne qui a été adoptée est la bonne. Nous essayons petit à petit de transférer la responsabilité de la sécurité aux autorités afghanes", a estimé le ministre vendredi sur Europe 1. Il a aussi annoncé qu'il rencontrerait lundi le commandant des forces internationales dans le pays, le général américain David Petraeus. Et qu'il se rendrait sur place "dans les semaines qui viennent".
Il y a sept mois, Alain Juppé qualifiait ce conflit de "bourbier terrible" et "d'impasse". Nicolas Sarkozy, lui, a affirmé qu'il faudrait rester en Afghanistan "aussi longtemps que nécessaire".
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