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Les banques françaises se retirent du plus grand projet charbonnier au monde

Société générale, BNP Paribas et Crédit agricole se sont engagées à ne financer aucun des projets d’énergies fossiles dans le bassin de Galilée, dans l’est de l’Australie.

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Publié le 08 avril 2015 à 19h07, modifié le 19 août 2019 à 12h53

Temps de Lecture 3 min.

L'immense terminal de charbon de Dalrymple Bay, dans le Queensland, à proximité de la Grande Barrière de corail.

Les lettres de BNP Paribas, du Crédit agricole et de la Société générale sont arrivées tard sur le bureau des ONG, mais elles ont le mérite d’être claires. Quelques heures avant la fin de l’échéance fixée au 27 mars par les Amis de la Terre en France, Market Forces et Sunrise Project en Australie, les trois banques françaises se sont engagées par écrit à ne plus financer les projets miniers pharaoniques situés dans le bassin de Galilée, près de la côte orientale de l’Australie, où se dresse la Grande Barrière de corail.

« Société générale confirme avoir suspendu son implication dans le projet Alpha Coal [l’un des neuf projets miniers du bassin de Galilée, qui comprend une mine, une voie ferrée et l’expansion d’un terminal portuaire à Abbot Point]. Société générale aujourd’hui n’est pas impliquée, ni n’envisage d’implication, dans les projets de mines de charbon et d’infrastructures associées du bassin de Galilée, en Australie », écrit la direction du développement durable de l’établissement bancaire français dans son courrier daté du 27 mars.

Ses deux concurrents confirment eux aussi leur désengagement de cette région australe qui focalise l’attention des défenseurs de l’environnement. Et pour cause. Ce vaste bassin charbonnier, s’il entre en exploitation, émettra 705 millions de tonnes de CO2 par an, presque autant que l’Allemagne, le sixième émetteur mondial de dioxyde de carbone !

« Risque réputationnel »

Les trois banques, qui comptent parmi les 25 premiers financeurs du secteur du charbon au niveau international (BNP Paribas occupe la 9e place du classement mondial dominé par JPMorgan Chase, Citi et Royal Bank of Scotland), auraient-elles soudainement pris conscience de l’impact des émissions de gaz à effet de serre sur la hausse du thermomètre qui menace l’équilibre de la planète ? Elles sont surtout sensibles au « risque réputationnel que font peser ces financements sur leur stratégie de communication », estime Lucie Pinson, des Amis de la Terre. « Cela peut faire très mal à une grande banque, surtout en France, qui accueillera la Conférence des parties des Nations unies sur les changements climatiques [COP 21] en décembre 2015 », insiste Yann Louvel, coordinateur de la campagne climat et énergie de l’ONG internationale BankTrack.

Ces engagements écrits interviennent après plusieurs mois d’action des Amis de la Terre, de Market Forces, de Sunrise project, et d’organisations partenaires comme Greenpeace et 350.org en Australie, le Rainforest Action Network aux Etats-Unis, Urgewald en Allemagne, Attac en France, qui militent toutes pour une décarbonisation progressive de l’économie mondiale. « On a bataillé pendant des mois, on est intervenu pendant les assemblées générales, on s’est mobilisé en décembre 2014 dès le premier jour de la Conférence de Lima sur le climat, la COP 20 », insiste Lucie Pinson.

La France, 4e financeur du charbon dans le monde

Jusqu’à présent, huit banques internationales avaient pris l’engagement de ne plus financer l’extension du port minier d’Abbot Point : Deustche Bank, HSBC, RBS, Barclays, Citi, Morgan Stanley, JP Morgan Chase et Goldman Sachs. Lors de la COP 20, les ONG ont remporté un succès de plus avec l’arrêt de la mission de conseil de la Société générale auprès du promoteur du complexe Alpha Coal.

En janvier 2015, elles ont expressément invité les trois acteurs financiers à mettre fin à tous leurs engagements dans le bassin de Galilée… ou à se préparer à une mobilisation internationale croissante jusqu’à la COP 21. « Alors qu’elles développent une rhétorique de lutte contre le changement climatique, les banques françaises ont augmenté de 218 % leur financement dans le secteur du charbon entre 2005 et 2013, note Lucie Pinson, à partir des données collectées par BankTrack. Sur cette période, la France est le quatrième pays qui a le plus financé le secteur du charbon, derrière la Chine, les Etats-Unis et le Royaume-Uni. Il faut mettre fin à cette hypocrisie. »

Greenwashing

Mais il en faudra plus avant de délivrer un certificat de bonne conduite aux grands opérateurs privés français. Les rapports sur la responsabilité sociale et environnementale (RSE), auxquels s’astreignent les entreprises bancaires, restent très opaques. Dans son rapport RSE 2013, BNP Paribas déclarait par exemple avoir accordé 6,5 milliards d’euros de crédits au secteur des énergies renouvelables fin 2013, mais ne chiffrait pas son soutien aux énergies fossiles.

Les banques, qui communiquent volontiers sur leurs « émissions directes » (liées au chauffage de leurs bureaux, à l’alimentation de leur parc informatique, etc.), ne disent rien des « émissions financées », bien plus conséquentes, qui résultent des activités qu’elles financent. Et ces experts du « greenwashing » restent très silencieux sur nombre de leurs investissements dans certaines activités énergétiques. Les sociétés minières américaines Alpha Natural Resources et Arch Coal, spécialisées dans une technique d’exploitation dévastatrice consistant à faire sauter à l’explosif les sommets montagneux pour faciliter l’accès au gisement, financent par exemple leurs projets grâce notamment aux titres obligataires émis par le Crédit agricole.

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