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La viande rouge est « probablement » cancérogène

La viande transformée (fumée, salaisons…) est, elle, classée comme cancérogène avéré par le Centre international de recherche sur le cancer.

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Publié le 26 octobre 2015 à 00h27, modifié le 26 octobre 2015 à 13h12

Temps de Lecture 5 min.

Les régimes riches en viande rouge pourraient être responsables de 50 000 décès par cancer par an dans le monde.

Les soupçons se confirment. Dans un document mis en ligne lundi 26 octobre et publié parallèlement dans la revue médicale The Lancet Oncology, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), agence de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), a annoncé le classement de la consommation de viande rouge comme « probablement cancérogène pour l’homme » (Groupe 2A). Celle des produits carnés transformés a été classée comme « cancérogène pour l’homme » (Groupe 1). Ces conclusions rejoignent celles avancées par l’Institut national du cancer (INCa) dans un état des lieux des connaissances publié en juin, qui considérait comme un facteur de risque « les viandes rouges et charcuteries pour le cancer du côlon-rectum ». Le Dr Christopher Wild, le directeur du CIRC, explique :

« Ces résultats confirment les recommandations de santé publique actuelles appelant à limiter la consommation de viande. Dans le même temps, la viande rouge a une valeur nutritive. Par conséquent, ces résultats sont importants pour permettre aux gouvernements comme aux organismes de réglementation internationaux de mener des évaluations du risque, et de trouver un équilibre entre les risques et les avantages de la consommation de viande rouge et de viande transformée, ainsi que de formuler les meilleures recommandations alimentaires possibles. »

  • Le terme de viande rouge comprend « tous les types de viande issus des tissus musculaires de mammifères comme le bœuf, le veau, le porc, l’agneau, le mouton, le cheval et la chèvre ».
  • Les produits carnés transformés (encore appelés viande transformée) font, eux, référence à « la viande qui a été transformée par salaison, maturation, fermentation, fumaison ou d’autres processus mis en œuvre pour rehausser sa saveur ou améliorer sa conservation ».

« La plupart des viandes transformées contiennent du porc ou du bœuf, mais elles peuvent également contenir d’autres viandes rouges, de la volaille, des abats ou des sous-produits carnés comme le sang », précise le CIRC. C’est le cas du jambon, des saucisses, du corned-beef, de même que des viandes en conserve, des préparations et des sauces à base de viande.

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L’industrie de la viande dénonce un « défi au sens commun » 

L’industrie de la viande n’a pas attendu la publication de la synthèse du CIRC pour riposter. Réagissant aux échos parus dans la presse britannique ces derniers jours, l’Institut nord-américain de la viande considérait que, dans le cas d’une classification comme cancérogène probable ou avéré des produits carnés, « l’agence défierait à la fois le sens commun et des dizaines d’études ne montrant pas de corrélations entre viande et cancer, et d’autres montrant les nombreux bénéfices sanitaires d’un régime incluant de la viande ».

Selon l’organisme de recherche indépendant Global Burden of Diseases Project, 34 000 décès par cancer seraient imputables dans le monde, chaque année, à une alimentation riche en viandes transformées, tandis que les régimes riches en viande rouge pourraient être responsables de 50 000 décès par cancer annuellement. Par comparaison, la consommation de tabac provoque un million de décès par cancer par an environ dans le monde, la consommation d’alcool 600 000 décès et la pollution atmosphérique plus de 200 000 morts.

C’est le cas du jambon, des saucisses, du corned-beef, de même que des viandes en conserve, des préparations et des sauces à base de viande.

L’étude du CIRC porte, elle, sur 800 études sur le cancer chez l’homme, examinées par 22 experts venus de 10 pays différents. Ils ont été réunis du 6 au 13 octobre pour rédiger la « monographie n° 114 » (synthèse d’études scientifiques) consacrée aux viandes.

Le groupe de travail s’est fondé sur la base d’« indications limitées » selon lesquelles la consommation de viande rouge est associée au développement du cancer colorectal chez l’homme. L’adjectif « limitées » signifie que cette association peut relever d’autres explications (hasard, biais, facteurs de confusion). Mais elle est soutenue par de « fortes indications » sur les mécanismes accréditant un effet cancérogène de la viande rouge. De fortes présomptions pèsent sur le rôle du fer héminique (présent dans le sang que contient la viande), ainsi que, dans le cas des charcuteries, celui des nitrates et nitrites utilisés pendant leur fabrication. Il existe également des données indiquant des liens avec le cancer du pancréas et le cancer de la prostate.

Pour la viande transformée, les experts disposaient d’« indications suffisantes » selon lesquelles la consommation de viande transformée provoque le cancer colorectal. Pour autant, le classement dans le groupe 1, qui comprend également l’amiante et le tabac, ne veut pas dire que la viande transformée soit aussi dangereuse que ces autres facteurs de cancer. Le CIRC rappelle que ses classifications « décrivent la force des données scientifiques sur un agent comme étant une cause de cancer, mais n’évaluent pas le niveau du risque ».

Pas d’expertise sur le rôle exact de la cuisson

Les experts du CIRC ont conclu, sur la base des données de dix études, que chaque portion de 50 grammes de viande transformée consommée quotidiennement accroît le risque de cancer colorectal de 18 %. « Pour un individu, le risque de développer un cancer colorectal en raison de sa consommation de viande transformée reste faible, mais ce risque augmente avec la quantité de viande consommée, explique le Dr Kurt Straif, chef du programme des monographies du CIRC. Compte tenu du grand nombre de personnes qui consomment de la viande transformée, l’impact mondial sur l’incidence du cancer revêt une importance de santé publique. »

Le risque de cancer associé à la consommation de viande rouge est, lui, plus difficile à estimer. Toutefois, si la causalité des associations rapportées entre la consommation de viande rouge et le cancer colorectal était prouvée, les données des dix mêmes études analysées par le CIRC laissent penser que le risque de cancer colorectal pourrait augmenter de 17 % pour chaque portion de 100 grammes de viande rouge consommée par jour. Cette consommation est très variable selon les pays, d’une infime minorité de la population pour certains à la totalité ou presque pour d’autres.

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Les experts du CIRC ne peuvent, en revanche, se prononcer sur le rôle exact de la cuisson. A haute température, elle génère des composés pouvant contribuer au risque cancérogène, mais leur rôle n’est pas encore parfaitement compris. La cuisson à température élevée ou celle où la nourriture est en contact direct avec une flamme ou une surface chaude (barbecue, cuisson à la poêle) produit davantage de produits chimiques cancérogènes comme les hydrocarbures aromatiques polycycliques et les amines aromatiques hétérocycliques.

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