La France retire onze pays de sa liste noire des paradis fiscaux
L’Etat français a annoncé jeudi 8 avril qu’il avait retiré onze pays de sa liste noire des paradis fiscaux pour n’en ajouter qu’un seul, le Botswana. La ministre du Budget, Valérie Pécresse, a défendu sa politique contre l’évasion fiscale devant une commission du Sénat mais une ONG estime que la France se montre encore trop complaisante sur la question.
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Un arrêté publié jeudi 12 avril au Journal Officiel révèle que l’Etat français a retiré onze pays de sa liste noire des paradis fiscaux (voir encadré) et n’en ajouté qu’un seul pour 2012, le Botswana. Désormais, les pays figurant sur la liste noire de la France ne sont donc plus que huit : Brunei, le Guatemala, les Philippines, les îles Marshall, Montserrat, Nauru et Niue ainsi, donc, que le Botswana, seule nation africaine de cette liste.
Pour rappel, sont considérés comme paradis fiscaux les Etats appliquant un régime fiscal anormalement bas, système qui attire les sociétés et les fortunes individuelles désireuses de se soustraire à l’impôt dans leur pays d’origine. A première vue, cette réduction de la liste des « pays suspects » peut surprendre mais il faut savoir que la liste noire en question ne concerne que les Etats ou territoires « non coopératifs vis-à-vis de la France ».
Liste noire, liste grise
Le ministère français des Finances garde en effet en ligne de mire une « liste grise » où figurent des Etats ou territoires toujours suspects mais qui ont passé des accords avec l’Etat français pour coopérer. C’est notamment le cas des onze pays retirés jeudi, lesquels sont donc passés du noir au gris. Interrogée par la commission d’enquête du Sénat sur l’évasion fiscale jeudi matin 12 avril, la ministre du Budget, Valérie Pécresse, s’est défendue de toute « naïveté » en la matière envers ces pays qui feront l'objet « d'une vigilance durable », avec possibilité de retour dans la liste noire.
« Je pense qu’il faut être extrêmement ferme sur l’application des accords », a soutenu Madame Pécresse. Etre ferme, l’Etat français aimerait l’être un peu plus avec la Suisse par exemple, pays avec lequel les accords passés connaissent encore des « points d’achoppement » selon la propre expression de Valérie Pécresse « La Confédération helvétique, a regretté la ministre, a dans son droit national l’obligation d’informer tout détenteur d’un compte en Suisse d’une demande d’information fiscale faite par un pays étranger, ce qui, a-t-elle convenu, nuit un peu à l’efficacité des contrôles ».
La ministre a d’ailleurs tenu à rappeler qu’une délégation du ministère des Finances avait été envoyée en Suisse en février « pour dire que l’application n’était pas satisfaisante ». D’après les chiffres communiqués par le ministère, 77 000 comptes bancaires français à l’étranger avaient été identifiés en 2010, soit trois fois plus qu’en 2007. Madame Pécresse a également précisé que les contrôles fiscaux avaient rapporté 16 milliards d’euros en 2010, « soit 1 milliard de plus qu’en 2009 », s’est-elle félicité.
Encore trop d’opacité
Ces résultats ne convaincront toutefois pas ceux qui restent persuadés que la lutte du gouvernement français contre l’évasion fiscale manque de persévérance, voire de volonté. Selon l’ONG CCFD-Terre Solidaire (Comité catholique contre la faim et pour le développement), au moins 20 milliards d’euros continueraient d’échapper chaque année au budget de l’Etat français. Une responsable de cette ONG rappelle que le réseau basé à Londres Tax Justice Network recense 54 Etats « à fort degré d’opacité financière », soit, si l’on fait les comptes, pratiquement un quart des pays de la planète qu'il faudrait placer sur la liste grise, voire sur la liste noire.
Touchés tout autant que la France, avec des évasions fiscales évaluées à plus 100 milliards de dollars par an, les Etats-Unis – dont les ressortissants vivant à l’étranger sont soumis à l’impôt – ont décidé de frapper fort en décrétant une loi baptisée Facta (Foreign Account Tax Compliance Act) qui sera appliquée à partir de 2013. Cette loi obligera les institutions financières à collaborer étroitement avec le fisc américain. Celles qui s’y refuseront risqueront une retenue de 30% de leurs revenus réalisés sur le sol américain, une mesure très dissuasive dont devrait peut-être s’inspirer l’Etat français.
Anguilla, le Belize, Costa Rica, la Dominique, l'île de Grenade, les îles Cook, les îles Turques-et-Caïques, le Liberia, le sultanat d'Oman, Panama, Saint-Vincent-et-les-Grenadines
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