Une enquête de l’Inserm* a montré qu’un tiers des étudiants en médecine prend des psychostimulants, légaux ou illicites. Certes ces études réclament une quantité colossale de travail pour ingurgiter toutes les connaissances nécessaires à la réussite des concours. Mais les plus jeunes, soumis à moins de pression, en consomment également. Selon un sondage de l’Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies (OFDT), publiée fin mai 2018, un lycéen sur six en a déjà aussi consommé au cours des 12 derniers mois. Les filles sont davantage concernées, sans doute parce qu’elles doivent obtenir de meilleurs résultats pour s’imposer dans la société et s’investissent donc plus dans leur scolarité : 20% des lycéennes prennent des psychostimulants, contre 10% des garçons d’après l’OFDT.  

Vitamines et caféine en cachet

Pour masquer la sensation de fatigue, les comprimés de vitamine C et de caféine, tels le Guronsan, sont très prisés. "Comme tous mes amis, j’en prends régulièrement en période d’examen, confie Ludivine, étudiante en droit. J’alterne café, Guronsan et boissons énergisantes pour tenir le coup ». Et c’est là que le bât blesse. "Si on respecte les doses indiquées dans la notice – soit deux comprimés par jour-, ces antiasthéniques ne posent pas trop de problème pour un jeune en bonne santé, estime le Dr Loïc Etienne, médecin urgentiste. Au pire, des palpitations et une nausée apparaissent".

Contrairement aux rumeurs qui circulent sur les forums internet, un Guronsan n’équivaut pas à 27 cafés, mais à un seul au maximum (50 mg de caféine/comprimé). En revanche, combiner médicaments à la caféine, tasses de café, Red Bull et colas est nuisible. L’excès de caféine génère en effet des tremblements, de la tachycardie, des maux de tête et des diarrhées qui augmentent le stress. Il réduit en outre les capacités de concentration et de mémorisation. Pas idéal pour arriver en forme aux examens !  

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Des médicaments détournés de leur usage

Nombre d’adeptes des psychostimulants optent pour des médicaments sur ordonnance non voués à cet usage, comme la Ritaline – un dérivé d’amphétamine normalement prescrit aux enfants présentant un trouble de l’attention avec hyperactivité (TDAH) – ou le modafinil, destiné à combattre la narcolepsie. Ces "smart drugs" sont monnaie courante dans les pays anglo-saxons. Une enquête du journal britannique The Tab suggère qu’un étudiant anglais sur quatre prend du modafinil pour accroître ses performances scolaires, dont 20% tous les jours. Et l’université de Caroline du Sud estime que 17% des étudiants américains prennent de la Ritaline.

La France n’est pas épargnée : 6,7% des étudiants en médecine français en seraient friands selon l’étude de l’Inserm. Ils se fournissent sur internet ou par le biais de collègues hospitaliers. À court terme, ce type de produit permet certes de réduire son temps de sommeil. Mais à la longue, des effets délétères sont à craindre. La Ritaline peut créer des hallucinations et des dommages cardiovasculaires. "Les dérivés d’amphétamines peuvent aussi réveiller des troubles de la personnalité, ajoute le Dr Etienne. Et leur arrêt brutal à la fin des examens suscite parfois des passages à l’acte – suicides - chez les personnes dépressives". Mieux vaut donc ne pas les utiliser à la légère.  

Un risque de dépendance

Ces dopants confèrent à ceux qui les prennent une impression de toute puissance. Mais le revers de la médaille est inquiétant : outre l’addiction pharmacologique, une dépendance psychologique s’installe. "Les personnes qui mettent le doigt dans cet engrenage ne font plus confiance en leurs propres capacités, observe le Dr Loïc Etienne. Ils se persuadent qu’ils ne peuvent plus surmonter un stress sans avaler de médicaments". C’est la spirale infernale qui conduit certains à passer à des drogues illicites, comme la cocaïne ou l’ecstasy. 

*Institut national de la santé et de la recherche médicale